Coups de coeur : Du grand libraire

Un Petit Noir pour Deux Grands Blancs

Bienvenue dans le monde impitoyable de l’édition où les auteurs ne dorment jamais… en tout cas, où ils ne mangent pas beaucoup.

Pour L’infiniment moyen de Fabcaro, nul doute qu’il est passé par une période d’ascétisme pour délirer autant : de la vie de bureau aux vacances, des amis au chien du voisin, toutes les scènes de la vie se succèdent avec une histoire par planche. Si effectivement le dauphin est plus intelligent qu’un chien, pourquoi fait-il  la gueule dans sa niche ? Qui ne rêve pas d’avoir son jeu « identité nationale » pour Noël cette année ? Par contre, la prochaine pub contre le téléchargement illégal des films est quasi insoutenable ! La campagne qui débute aujourd’hui contre le tabac, à coté c’est rien… Peut-on rire de tout et avec tout le monde…? Je n’ai pas fait sous moi – comme à chaque fois que je relis Idées noires deFranquin – mais j’ai passé un super moment de poilade. C’est pas tout ça, mais je ferais bien une partie de jokari maintenant .

Pour se rafraîchir en ces temps de premières chaleurs, que diriez-vous d’une petite ballade, remonter l’océan atlantique, se laisser porter jusqu’en Islande, pays des Vikings ? A la barre de notre drakkar, Jean-Paul Krassinsky et Marc Védrines, les auteurs de La saga des brumes aux éditionsGlénat. A notre bord, Einar et son frère Olaf ainsi que leurs compagnes, bannis pour avoir amener la discorde contre le clan deThorsteinn. La survie sera rude et l’île ne sera pas spécialement paradisiaque…Pour tous ceux qui ont aimé Messire Guillaume .

Si l’Islande est encore trop tempérée à votre goût, le paradoxe vous amènera à lire Celle qui réchauffe l’hiver de Pierre Place aux éditions Delcourt, ouvrage dirigé par David Chauvel. L’histoire des peuples du Grand-Nord, de Aamat « celle qui rechauffe l’hiver », cette jeune femme, survivante des conditions rudes de l’hiver qui pousse parfois les habitants aux sacrifices les plus extrêmes.

Pourtant, cet ouvrage vous offre une succession de récits autour de Aamat, drôles ou attachants, teintés de mysticisme et montre comment leur univers évolue avec l’arrivée des comptoirs de ventes.

L’univers graphique est captivant, à vous donner des rêves d’ours pôlaire ! Le petit plus, si ce genre d’univers vous intéresse, essayez de voir le film Atanarjuat, un summum visuel .

Shake shake shake…

Move your body and come on in my « librairie » (en français dans le texte ) ; que diriez-vous d’une petite sélection, selon que vous souhaitiez travailler les zygomatiques ou bien les méninges, jouer du couteau ou de la corde sensible : welcome in my world !

Commençons avec les bouquins les plus barrés voulez-vous :

West terne, ou comment les tuniques bleues se sont retrouvées isolées derrière leur grande clôture sensée les protéger des vilains Apacheros. Seulement voilà, les femmes ont disparues et il va falloir monter une expédition en territoire ennemi, incognito. Michel Galvin nous présente son nouvel album chez Sarbacane, avec une sur-enchère de grotesque et d’idées pas si farfelues que ça : John Wayne n’a qu’à bien se tenir.

Avec Fables Nautiques de Marine Blandin, petit format de la collection Shampoing chez Delcourt, c’est une invitationvers les grands fonds d’un bassin  de piscine. Mine de rien, on met son maillot, on trempe quelques orteils, et sans s’en apercevoir on est parti pour une apnée jusqu’au terme de la BD. Tout commence avec cette scène touchante d’une petite fille qui vient donner une carotte à son ancien lapin domestique qui repose maintenant dans un cimetière qui va devoir céder sa place à une piscine. Nous retrouverons cette petite fille en petite vieille, terroriste activiste, bombardant inlassablement chaque soir, un des bassins à l’aide d’une carott . Un des maitre-nageur n’a de cesse d’essayer de lui mettre le grappin dessus, mais il se passe d’autres phénomènes inexpliqués : les cuisseuses sont en route, ce n’est pourtant pas la période de leur migration ; Gormone, la danseuse aquatique ne se plait plus dans son palais, les 3 du jacuzzi veulent de nouveaux potins ; et c’est quoi cette histoire de baleine ?

James & La tête X, ces deux là nous offre dans  l’épi aux éditions 6 pieds sous terre un petit précis d’humour autour du monde du travail. Avec sa série Dans Mon Open Space, James relatait les débuts tumultueux d’un stagiaire fraîchement débarqué dans le monde du travail. Là , on se retrouve avec le travailleur qui est déjà conditionné, qui sait pertinamment qu’il se fera engueuler demain par son patron, qui rêve du jour de l’abolition du port de la cravatte … un recueil d’histoires courtes désopilantes .

Voici un match de foot qui résume assez justement ce que je pense de ce sport et de tout ce qu’il véhicule : Athlétic Sport Saint-Etienne – Olympique Lyonnais , ou A.S.S.E./O.L. , ou encore Ass hole . Saint-Etienne – Lyon, c’est l’histoire d’une famille qui rêvait d’assister au match de leur équipe préférée, mais en déplacement…

Du coup , ils ont voulu prendre l’avion , le premier signe qui aurait dû leur mettre la puce à l’oreille, c’est d’avoir oublié la mère à la maison, ou plutôt, en train de courir derrière la voiture. Les preneurs d’otages du front de liberation de la Savoie, c’était peut-être trop évident, mais bon, un petit séjour sur une île après un crash d’avion, cela aide à relativiser, d’ailleurs ne dit-on pas :  » Le nain au sommet de la montagne n’est pas grand pour autant  » -proverbe gréco-japonais .

En ce qui concerne la grande claque visuelle, et l’univers qui mérite que l’on se perde dedans, bienvenue dans CE de Roosevelt auto-édité auxEditions du Canard. Nous en sommes au cinquième sur les onzes tomes de prévus pour cette série qui ose !

J’ai toujours été sous le charme du trait deRoosevelt, créateur du personnage de Juan Alberto, mais  pour cette fois, il nous entraîne de l’autre côté du miroir, avec cet immortel qui ne devrait pas rêver, mais qui du coup se voit ouvrir de nouvelles perspectives. Le fait de passer successivement d’un monde à l’autre va le perturber encore plus, l’amour, la violence, la folie … bienvenue dans le monde de CE .

Un Amour Simple de Bernard Grandjean à La boîte à bulle, collection contre-jour, plein  de poésie et de délicatesse pour cette oeuvre qui raconte l’histoire d’amour de deux résidents d’un asile psychiatrique et qui vont vouloir partir voir la mer. La réussite de ce livre, outre le côté touchant, c’est d’alterner l’humour avec le travail de ceux qui aident ces personnes au quotidien, la moindre sortie au super marché deviens une épreuve digne d’Ulysse. Ce n’est bien évidemment pas une grande nouveauté, il y avait le film  » le Huitième Jour «   qui était efficace, mais Un Amour Simple a ce charme des lectures simples.