Coups de coeur : Du grand libraire

Mort & vif: comment jouer avec la mort.

Mort & vif, c’est le titre du nouvel album de David Prudhomme, mais cela convient tout à fait au dernier titre de Luz: Puppy; qui est l’histoire d’un chien mort mais bourré de vitalité et d’envie de jouer.

Mort & vif aux éditions Futuropolis, le scénario est de Jef Hautot (ce qui est drôle étant donné qu’il va y avoir des voitures dans l’histoire, mais vous avez raison, je ne devrais pas commencer une nouvelle fois avec l’humour bas de gamme qui me caractérise, à la rigueur s’il s’était appelé Serge, j’aurais pu me le permettre: Serge Hautot – siège auto…)

HUM ! Reprenons nous. Mort & vif, collaboration à quatre mains ou deux cerveaux entre Jef Hautot et David Prudhomme. David Prudhomme, j’avais déjà eu l’opportunité de vous le mettre en avant en septembre 2015 lors de la sortie de Vive la marée, co-écrit avec Pascal Rabaté (toujours chez Futuropolis) une histoire d’une journée à la mer que je trouvais judicieux de vous taquiner avec au moment de la rentrée scolaire ou bien de la reprise du boulot en général. Et c’est là où le tiens à m’excuser, car j’avais mis en avant Pascal Rabaté pour la manipulation de l’image, en oubliant un peu trop vite le travail de David Prudhomme

En débutant ma lecture de Mort & vif, à la page 3, je commence à me dire que l’on me titille la rétine, à la page 5, c’est confirmé, je reprends ma lecture depuis le début pour être le plus attentif possible, tant est énorme le travail du dessinateur.

Philippe Moline alias Flip travaille chez Deleter & fils (ouvre-boîtes & clés à sardine). Une clé à sardine qu’est-ce que c’est ? La question n’est pas anodine étant donné la suite de l’histoire, et si je pose la question, c’est qu’il y a dorénavant la fameuse languette d’Ermal Fraze que tout le monde connait sur le boites de sardines pour les ouvrir (ah si cela avait existé du vivant de Franquin, les gags de Gaston eurent étés métamorphosés). Donc, une clé à sardine, c’est une petite tige métallique, recourbée en forme de triangle du côté de la prise en main et bénéficiant d’une encoche de l’autre côté, permettant de saisir une partie du couvercle des boites pourvue à cet effet, qui dépassait sensiblement dans un coin, puis vous tourniez votre clé, découvrant ainsi au fur et à mesure le contenu tant désiré à consommer. Mais Flip lui, il en pique afin de construire une tour Eiffel en clés à sardine et l’offrir à sa petite amie, Patricia, qui travaille elle aussi chez Deleter & Fils

Bref ! Flip rentre du travail, c’est la fin de la semaine, mais à la maison, Patricia n’est pas là ! Elle vient de le quitter, lui laissant tout de même une lettre de rupture (ET la tour Eiffel). Dépité, il décide de sortir et se prendre une grosse cuite, au point de se mettre vraiment mal et d’être coincé le samedi et le dimanche au lit. Le lundi suivant, il se rend au travail comme à son habitude, mais curieusement, arrivé devant l’usine, il ne descend pas du bus, en fait c’est son indécision qui fait qu’il continue le trajet jusqu’au terminus du transport. De là, il erre dans la ville, croise occasionnellement son patron, mais sans interaction, et se pose au beau milieu d’un rond-point, perdu dans ses pensées.

« Trashy« , musicien de son état, passe par là en voiture, et le prend en stop: débute alors une virée des plus rocambolesques pour Flip, qui va vraiment flipper pour l’occasion.

Pendant ce temps, les employés de Deleter & fils qui eux se sont rendus au travail se retrouvent le bec dans l’eau, car leur cher patron a profité du week-end afin de revendre toutes les machines et a fait vider l’usine pour disparaître dans la nature (vous vous rappelez que j’ai écrit plus haut que Flip ne cessait de le croiser ?).

Cela a un petit goût du film Louise Michel avec Yolande Moreau. Lorsque j’ai commencé cette chronique j’ai évoqué le travail graphique qui m’avait très tôt surpris. En effet, vous allez pouvoir attarder votre regard sur chacune des pages de l’album car David Prudhomme exploite au maximum l’image et la mise en page. 

Chaque trait est la continuité d’un autre, les formes s’enchevêtrent les unes les autres, se répondent d’une case à l’autre, ainsi la physionomie de l’homme accroupi devant la cheminée dans une image, devient les contours du paysage montagnard dans la case d’à côté. Etant donné qu’il est difficile de rendre par des mots des effets visuels si complexes, il ne vous reste plus qu’à ouvrir l’album pour découvrir ce que j’essaye de vous décrire.

Et si l’on doit jouer avec la mort, laissons la mort déborder de vie, avec Puppy de Luz aux éditions Glénat.

L’album est sorti début Janvier et je me navre de voir que pas une seule personne ne l’ai pris dans notre librairie, et pourtant parmi nos lecteurs, bon nombre d’entre vous pourrait y trouver satisfaction.

Luz est et restera l’un de mes auteurs préférés parmi les différents noms qui auront travaillé pour Charlie Hebdo, son trait est vif, créatif et récréatif. 

A la fin de l’album, vous avez la double page à l’origine de cette histoire, un article consacré à un cimetière du côté d’Asnières avec de singuliers locataires, on y trouve pas spécialement des mammifères mais surtout des animaux qui ont du flair: un endroit consacré au dernier repos de nos animaux de compagnie, des chiens, des chats, mais peu de poissons rouge car Bubulle et consorts ont plutôt tendance à finir dans les toilettes.

C’est l’histoire de Puppy, qui se relève de sa tombe, s’ébroue afin de se débarrasser des chairs mortes superflues pour commencer son errance dans sa nouvelle aire de jeux.

libre comme l’air et l’air de rien, Puppy est mort & vif à la fois, le quadrupède baguenaude au fil de ses envies, marque d’un revers de la patte son nouveau territoire, il est mort me direz vous, comment pourrait-il être en mesure d’avoir encore des fluides corporels ? on s’en fout, n’est-il pas drôle de voir Puppy se laisser aller, suivre son instinct, ou bien narguer le féroce molosse qui n’en aurait fait qu’une bouchée de son vivant.

Il tombe amoureux de la photo d’une petite chienne, joue avec les nonosses et c’est peu dire qu’il est au meilleur endroit pour en dénicher, même si parfois la digestion est un peu dure. Il court et joue, cherche une baballe, et il en trouve, on apprécie d’ailleurs l’hommage de Luz pour ses amis, avec toutes ces balles de tennis présentes dans cette bulle en verre qui repose sur la tombe de Charlie, et Puppy leur donne une nouvelle vie.

Bon! Batifoler dans son aire de jeu, c’est bien, mais cela ne va qu’un temps, pourquoi ne pas agrandir son territoire et partir dans les rues au risque d’effrayer les passants. Seulement, il n’y aura point de vent de panique, car voilà, les humains ont disparu. Les rues sont pleines des vestiges de la vie courante, nous voyons des scènes du quotidien, où il ne reste que les vêtements des personnes, laissés en suspends, on apprécie d’ailleurs cette vue du dessus de cette dame un peu forte, qui permet d’apercevoir la tête de Puppy au travers de sa culotte.

Luz nous offre de la légèreté, de profiter, de nous amuser, alors rions avec lui cal lui fera plaisir comme à nous, et soyez contents, je ne vous demande pas de vous mettre tout nu et de vous lancer à quatre pattes à baguenauder en remuant de la queue.

Merci Luz pour cette évasion canine. Comme quoi on peut encore rire un bon coup avec la mort, car elle ne se gêne pas, elle, pour rire de nous.

 

Tony Chu

C’est la fin mes amis ! Tony Chu t12- Le dernier repas (The last supper comme disent les Monty Python, d’ailleurs je vous conseille chaudement leur sketch: Why Michelangelo didn’t paint The Last Supper) est le dernier tome de la série. Notre détective cannibale tire sa révérence en beauté, John Layman et Rob Guillory ont mitonné un récit aux petits oignons (et j’arrêterai là les jeux de mots tout pourris liés à l’art culinaire pour illustrer mes propos, je ne voudrai pas pondre écrire un article indigeste).

Tony Chu, détective cannibale est une série en 12 tomes publiés par les éditions Delcourt en France et raconte l’histoire de cet agent de la R.A.S. (répression des Aliments et Stupéfiants) qui a la particularité d’être Cibopathe ??? 

Cibopathe; Saboscrivneuse; Cereduratus; Cibovoyante; Xocoscalpère; Tortaespadero… non ! je ne suis pas possédé par un démon ou une quelconque entité surgie du fond des âges qui me ferait utiliser une langue disparue depuis des millénaires. En lisant Tony Chu, vous allez découvrir tout un tas de termes dont vous ignoriez jusqu’à la possibilité, mais rassurez vous, tout cela est fictif, et si ce n’est pas le cas, il est déjà trop tard pour commencer à vous inquiéter. 

Cibopathe: imaginez que lorsque vous mettez en bouche un aliment, vous soyez en mesure de ressentir tous les stades par lesquels il est passé. Je m’explique ou tout du moins reprend l’explication de la Bande Dessinée: une bouchée de pomme vous indique sur quel arbre elle a poussée, quels pesticides ont été utilisés, quand est-ce qu’elle a été récoltée… et pour de la viande c’est pareil, cela vous ferait quoi de ressentir la venue au monde d’un être vivant, revivre toute sa vie ET sa mise à mort, plein de réjouissances en perspective. Ben pour Tony Chu, c’est son quotidien, seule consolation en ce qui le concerne, il y a une exception: LA BETTERAVE ! En effet, lorsque Tony mange de la betterave, il ne ressent rien, ce qui peut être un soulagement d’un côté, mais lui impose un régime alimentaire drastique (et ils sont où les 5 fruits & légumes ?).

Cette singularité, ils sont trois sur la planète à la partager, Tony Chu y compris, et en travaillant pour la R.A.S. il va être mis à contribution pour résoudre des enquêtes. En effet, certaines affaires sont parfois irrésolues par manque d’éléments, et des tueurs peuvent continuer à courir et commettre de nouveaux méfaits. Alors si vous avez à disposition dans vos effectifs, une personne qui pourrait, en grignotant un tout petit, mais alors tout petit bout de la victime vous aider à résoudre une enquête en identifiant l’assassin et son mode opératoire, pourquoi vous en priveriez vous ? Après tout n’est affaire que de persuasion pour que votre employé accepte de mâchouiller du cadavre au petit déj’

Tony Chu va donc continuer à mener ses enquêtes, pas toujours dans les meilleures conditions. Ses supérieurs ne l’aiment pas et lui font vivre un enfer, le moindre pépin qui arrive dans la vie de Tony… ils exultent de joie. Ses partenaires ? Multiples et variés, parmi eux, un autre Cibopathe, Malloy qui n’inspire vraiment confiance mais qui est le seul en mesure d’aider Tony Chu à développer ses capacités. John Colby, un de ses rares amis, mais qui peut apporter autant de soutien que d’emmerdes, ah ! et à moitié cyborg également, mais c’est une autre histoire. 

Le contexte . Suite à une vague de grippe aviaire, la consommation de poulet est totalement interdite, ce qui ne sera pas sans conséquences dans l’histoire. Il y a également ces lettres incandescentes qui sont apparues dans le ciel, c’est joli non ?! Boarf, si on passe outre le fait que c’est annonciateur de la fin du monde, on peut considérer ça joli.

Et si on parlait de son entourage ? Tony Chu a une famille (comme tout le monde en général), bien évidemment très particulière. Entre autre, sa soeur qui a la particularité de pouvoir voir l’avenir d’une personne en la mordant, il n’est pas si courant d’en arriver à mordre quelqu’un sans son consentement, même dans l’intimité. Son frère quant à lui se retrouve de l’autre côté de la loi, grand chef réputé, il s’est élevé contre le gouvernement en criant au complot, prétextant une désinformation et une exagération de la grippe aviaire, il est rentré dans la clandestinité et s’est spécialisé dans les recettes à base de poulet. Tony a également une fille qui va se révéler importante dans l’histoire (oh mon dieu le spoil !).

Mais ce n’est pas tout ! Qu’est-ce qui a provoqué un tel engouement pour cette série ? l’élément le plus improbable qui soit. La perle cachée des aventures de Tony Chu est un COQ. Oui ! Mesdames et messieurs, vous avez bien entendu ! UN COQ !!!

Mais pas n’importe quel coq, bien entendu. POYO, le coq ultime. Agent spécial de la R.A.S., Poyo est l’arme ultime et ultra secrète du gouvernement. Un coq de combat cybernétique.

Même l’enfer tremble rien qu’à susurrer son nom, car il est assuré qu’un jour Poyo viendra dans les tréfonds et que nul n’en ressortira indemne.

En dehors du rôle que Poyo va jouer dans l’aventure, notre coq de combat, aura le droit à ses propres mini aventures qui permettent une respiration entre les différents récits qui ponctuent la série. Il y a une trame principale qui va vous tenir en haleine de bout en bout de l’histoire, mais l’avantage de cette série, c’est que vous avez les différentes affaires auxquelles Tony Chu va être lié qui dynamisent votre lecture.

Conclusion, les aventures de Tony Chu, détective cannibale rentrent dans les incontournables des séries déjantées.

 

 

Full sentimental

Satoshi Kon, vous connaissez ? Non ? Kazuo Kamimura ? Non plus ? Yasunari Kawabata ? encore ? décidément je n’ai pas toujours de chance. Mais non, suis-je bête, c’est au contraire ce que je souhaite vous faire découvrir.

Aujourd’hui je reviens une nouvelle fois avec mes grands chevaux célestes venus d’Orient, Mangas, Manhwas et Manhuas (enfin pas de Manhwa cette fois car il n’y a pas de titres en provenance de la Corée). Nous sommes bien évidemment tristes de la disparition de Jiro Taniguchi qui a ému un grand nombre de lecteurs, sa contribution au patrimoine mondial de la Bande dessinée n’a pas été des moindres tant il aura écrit et dessiné une multitude de titres et fait parti des auteurs remarqués par Moebius, ce qui était un bon gage de qualité pour espérer se faire remarquer.

Fossiles de rêves de Satoshi Kon chez Pika Graphic

Il est bien naturel que beaucoup de personnes ignorent qui est Satoshi Kon, par contre si vous vous intéressez à la Japanimation, aux auteurs underground qui ont bouleversé la scène culturelle internationale, là vous êtes quasi impardonnables. L’auteur a disparu en Août 2010, certaines de ses oeuvres restent inachevées, vous pouvez trouver facilement certains de ses films, Perfect Blue, Millenium actress, Tokyo godfathers… mais concernant ses manga (papier) trop peu de titres sont disponibles, comme Opus qui fut réédité il y a peu chez Imho en même tant que Seraphim 266613336 Wings (avec Mamoru OshiiGhost in the shell, Avalon…) 

Fossiles de rêves sort chez Pika Graphic, jusqu’à présent l’éditeur publiait surtout des formats classiques mais depuis peu se tourne vers le roman graphic, en ce qui concerne le livre de Satoshi Kon, c’est un recueil de plusieurs histoires courtes passant allègrement du médiéval au fantastique, mais avec une majorité d’histoires contemporaines.

Tout comme Katsuhiro Otomo (Akira…) ou Taiyou Matsumoto (Sunny…), Satoshi Kon met bien souvent en scène des enfants comme personnages centraux, leur permettant de jouer avec l’innocence de ces chères têtes blondes, plutôt brunes au Japon, leurs émotions plus à fleur de peau ou encore leur impulsivité.

Dans la première histoire qui est un récit de Science-Fiction, nous commençons avec un cadre « normal », contemporain ? Si l’on découvre des habitants d’un quartier avec leurs habitudes, très vite on constate la vétusté des habitations, des rues, la végétation qui reprend ses droits. On devine le confinement d’un quartier à l’autre, le mystère plane et installe l’ambiance. L’arrivée d’un robot de combat nous fait basculer dans leur contexte quotidien, et après la magie de l’auteur opère…

Il s’en suit des histoires permettant de découvrir certaines particularités de la culture Nippone, de leur passion pour le Baseball, des histoires de fantômes toujours présents dans l’imaginaire populaire Japonais… De la violence, de l’émotion, de la tendresse, des préoccupations du quotidien, dans Fossiles de rêves, vous retrouverez l’essence même de chacune des créations de Satoshi Kon.

Les petites contemplations de Yao Ren chez Urban China

Alors là pour le coup, si vous connaissiez déjà Yao Ren, c’est que vous êtes incollables sur l’univers étendu de tout ce qui touche World of Warcraft, il publiait sur son blog, les aventures de son avatar dans le jeu. Il a par la suite, décidé de se tourner vers plus de légèreté, et ce sont différentes nouvelles qui nous sont proposées dans cet album.

5 histoires, 5 ballades, 5 expériences de l’auteur. 

La première est une bonne introduction pour l’un des titres que je vais vous chroniquer par la suite, Yao Ren évoque un restaurant de quartier, une petite gargote ne payant pas de mine, mais qu’i appelle intimement « Chez grand-père ». Il partage avec le lecteur la satisfaction d’avoir ce lieu ou se réfugier, échapper à son quotidien, qui lui permet également d’apprécier les mets qui lui sont proposés. Mais l’observation des autres personnes venant se restaurer dans ce restaurant, habitués ou non, lui démontre qu’il passe encore à côté de bien de petites surprises culinaires, qui ne cesse de lui donner d’autres motivations pour repasser une prochaine fois.

Les deuxième et troisième histoires ont ceci en commun, que son ce sont ses déambulations sous les intempéries. « Sous la pluie » et « Paysages d’hiver » sont des récits de promenades dans son quartier, d’observations méticuleuses et anecdotiques, comme une vieille dame qui nourrit les chats errants de son quartier, mais en faisant en sorte qu’ils ne se mouillent jamais les pattes, les habitudes des personnes qui fréquentent un parc municipal qui change d’aspect sous la neige et dont le lac gèle, les incitant à « braver le danger » en s’hasardant sur la glace.

La quatrième relève aussi de l’observation, « Caches à chats » révèle, non pas un jeu chinois, mais une spécificité: face à l’intolérance et à l’élimination des chats errants, certains habitants du quartier, fabriquent en catimini, de véritables repères cachés aux yeux de tous, afin que les chats puissent avoir un endroit où passer l’hiver à l’abri du froid, leur pratiquant même des sorties de secours au cas où un intrus tenterait de les y bloquer. Et la dernière histoire, « Le murmure des fleurs », n’est autre que le partage de l’auteur d’un souvenir d’une histoire que lui racontait sa mère lorsqu’il était plus jeune, mais dont il a ignoré pendant longtemps le dénouement. Beaucoup de sensibilité dans son écriture, on ressent pleinement le côté intimiste mais jamais voyeuriste, son dessin est un régal, même si l’on peut trouver un aspect rugueux à ses trames.

Si je vous ai mis en appétit précédemment, restons dans la restauration voulez-vous, La cantine de minuit de Yarô Abe aux éditions Le Lézard Noir.

C’est un premier tome, mais qu’importe étant donné que ce sont plusieurs nuits, donc plusieurs histoires qui se succèdent au fil des pages, 30 histoires chacune intitulée du nom d’un plat culinaire. Quelle est la particularité de cet établissement ? Le restaurant n’ouvre que de minuit à sept heures du matin, ne propose qu’un plat unique et trois types de boissons, MAIS, le patron est prêt à répondre à toute exigence de plat, SI il a à disposition les ingrédients pour le faire.

C’est un restaurant de quartier, avec ses habitués que l’on retrouve au cours des récits, bien que les horaires soient originaux, il n’empêche que la vie nocturne est assez animée dans le quartier et le nombre de clients suffisamment conséquent pour y trouver une certaine diversité.

De rôle principal, à secondaire, les clients se côtoient, partagent certaines aventures culinaires ou sentimentales, et bien souvent les deux. Il y a un côté attachant étant donné que l’on voit la vie de certains évoluer, on a l’opportunité de découvrir en même temps que les autres personnages certains aspects de leur vie qu’ils leur ont caché.

Le rôle du patron est bien évidemment le lien social qui unit tous ces habitués du lieu, les plats se succèdent sous vos yeux, ce qui a donne l’eau à la bouche. Vous n’avez pas les recettes, mais bénéficiez de pas mal de renseignements sur les ingrédients qui composent le plats, et parfois sur certaines préparations: A TABLE !!!!

Pays de neige de Utsugi Sakuko d’après Yasunari Kawabata chez Philippe Picquier éditions.

Yasunari Kawabata est l’un des piliers de la littérature Japonaise, mais on peut très bien n’en avoir jamais lu et le vivre sereinement. Mais autant profiter d’une adaptation en manga pour passer le cap. 

C’est une rencontre au fin-fond de la province Nippone, une petite station thermale isolée de tout, où Shimamura va laisser traîner ses guêtres. Ce jeune homme a hérité de la fortune familiale et peut désormais consacrer son temps à l’élaboration de ses ouvrages littéraires consacrés à l’étude de la chorégraphie occidentale, pour un japonais ne mettant pas les pieds hors du pays, cela parait bien futile.

Lors de sa pause dans ce village, il fait la rencontre de Komako, jeune apprentie de Shamisen, cet instrument à corde traditionnel dont jouent les Geishas

Shamimura revient depuis lors chaque année, une fois par an afin de passer quelques jours dans le village et retrouver Komako.

La relation entre les deux jeunes gens n’est pas simple, tant est que Komako oscille entre ses sautes d’humeurs, tantôt tendre et charmante, tantôt distante et réfractaire, elle continue son travail de dame de compagnie, abusant trop souvent de soirées très arrosées, mais qui finissent invariablement par le besoin de retrouver Komako dans sa chambre, mais en prenant bien garde de ne se faire voir des autres habitants de village où les ragots ont tôt fait de circuler et de vous marginaliser. 

Si ce n’était que cela, tout vous paraîtrait trop simple, du coup Kawabata a complexifié un peu son histoire, car Komako réside dans une maison avec deux autres personnes, une jeune femme Yôko, et l’on sent l’ai crépité lorsque les deux deux femmes sont présentes au même endroit. Et entre elles, Yukio, fils de celle qui enseigna le Shamisen à Komako, et qui est atteint au dernier stade d’une tuberculose intestinale.

Quelle est la relation réelle entre ces trois personnes ? Qu’est-ce qui peut bien réussir à les unir entre la haine et l’affection à ce point.

C’est un récit intime, agréable à l’oeil, avec une certaine nonchalance dans l’écriture, qui permet aux scènes plus dynamiques d’être explosives, notamment sur les humeurs de Komako.

Voici plusieurs idées de lecture, j’aurais pu également vous présenter Une femme de showa de Kazuo Kamimura & Ikki Kajiwara chez Kana, un auteur que j’affectionne particulièrement pour la finesse de son trait et les thématiques de ses histoires, tantôt sentimentales, ou comme ici, une histoire de vengeance, sa plus célèbre étant Lady Snow Blood, une trilogie disponible à la librairie, qui influença Tarantino pour son Kill Bill.

4 histoires.

Envie de vous détendre et d’apprendre ? De vous souvenir ou de vous investir ? Back-up sur la scène Hip Hop avec Hip Hop Family Tree t1- 1970’s-1981 de Ed Piskor chez Papa Guédé Treasury édition. On remonte plus loin dans le temps avec le Manga Pline, de Mari Yamazaki & Tori Miki éditions Casterman. Et voyage en Espagne avec deux titres: Des espaces vides, de Miguel Francisco, éditions Delcourt – Mirages, et Proies Faciles, de Miguelanxo Prado, éditions Rue de Sèvres

Mari Yamazaki a été élue « Femme de l’année » 2012 par Vogue Japon, rien que ça, cette auteure s’est fait connaître en France et de par le monde grâce à sa série Thermae Romae, une série courte teintée d’humour qui mettait en parallèle les cultures Japonaise & Romaine autour de leur passion commune pour les thermes ou l’art du bain.

La voilà qui revient toujours chez le même éditeur, Casterman pour une nouvelle série réalisée à 4 mains en compagnie d’un autre dessinateur, Tori Miki, consacrée à Pline (l’ancien). Vous ne savez pas qui est Pline ? Qu’à ne cela ne tienne, pour ma part je ne connaissais de lui que sa présence dans un sketch de Desproges, et qui ne m’en apprenais pas beaucoup sur le personnage.

Pline était et restera l’un des naturalistes les plus éminents à travers les siècles, et c’est notamment en partie à son Histoire Naturelle, que les auteurs ont décidé de lui consacrer cette série.

Pline l’ancien (Galius Plinius Secundus) a vécu au premier siècle de notre ère, contemporain de Néron, il n’avait pourtant rien en commun avec le césar de l’époque. Véritable témoin de son époque, il n’avait de cesse de coucher sur tablette, tout se dont il était témoin, de manière exhaustive peut-être, mais c’est ce qui a suscité l’intérêt des auteurs. Si les spécialistes dégagent du texte les élucubrations de l’auteur, c’est cet amalgame d’étude scientifique et de contemplation de la vie de ses contemporains qui en fait un témoignage des plus complet afin de comprendre la société de l’époque, la vie au jour le jour, y compris avec la culture populaire et leur croyance de l’époque.

Cela complète les Mangas que nous avons déjà pu voir passer avec une approche historique, Cesare (sur la jeunesse de Cesare Borgia), Ad Astra (la guerre entre Scipion et Hannibal), Eurêka ! (consacré aux inventions qu’Archimède développa afin d’assurer la défense de Syracuse), Le chef de Nobunaga (le Japon médiéval du XVIème siècle)…

Hip Hop Family Tree t1- 1970’s-1981 de Ed Piskor éditions Papa Guédé Treasury Edition.

Comment est né le RAP ? Quels sont les précurseurs de ce mouvement urbain ? De quelles têtes ont bien pu sortir ces sons et ces prouesses musicales de scratch et autres performances? 

Si vous faites partie de la génération qui a connu le début du Hip Hop, c’est sûr cela va faire un coup, un coup de vieux bien entendu, car sachez le, les maisons de repos ont de plus en plus de résidents tatoués, percés… les générations se succèdent et ce qui nous fait grandir devient une mode de « vieux cons ».

Il n’empêche que de se replonger dans les débuts d’artistes, qui donneront des groupes comme Public Ennemy, les Beasty Boys et j’en passe, cela fait un bien fou.

La culture populaire se renouvelle sans cesse, et à une telle rapidité que l’on aurait tôt fait d’oublier d’écrire son histoire. Ed Piskor s’est attelé à la tâche, et avec une approche graphique spécialement « vieillotte » donne le ton à ce voyage temporel et culturel. 

L’album bénéficie de suppléments intéressants, un index des groupes et artistes cités tout au long de l’album, une discographie plus quelques Breaks & Beats évoqués. Vous pouvez également retrouver la bande son sur papaguede.fr

A mettre entre toutes les mains des curieux de l’histoire de la musique, de celles et ceux qui cherchent des références musicales, d’artistes ou de morceaux. Vous souhaitez briller en soirée ? Pour une soirée Disco choisissez un pantalon patte d’eph’ avec des paillettes, pour du Hip Hop, choisissez plutôt Hip Hop Family Tree.

En dehors de mon expérience personnelle avec ce genre musical, j’ai déjà fait le tour de quelques copains qui bossent dans le domaine,DJ’s, rappeurs et autres, et ils sont tous dithyrambiques sur la qualité du fond et de la forme de cette Bande dessinée et ils attendent la suite avec impatience.

Direction l’Espagne pour finir avec deux récits: Des espaces vides de Miguel Francisco aux éditions Delcourt-Mirages.

Il y a une recrudescence de titres consacrés à la guerre d’Espagne c’est dernières années, et comme le titre de l’année dernière Jamais je n’aurai 20 ans de Jaime Martin chez Dupuis- Aire Libre, Miguel Francisco l’aborde sous le côté du témoignage familial, mais avec l’originalité de ce qui n’a pas été transmis.

En effet, c’est à une occasion particulière de sa vie que Miguel va s’attacher à relater le récit de son grand-père. A ce moment du récit, Miguel s’est séparé de sa compagne, il se retrouve seul avec son fils et doit se rendre en Finlande pour son prochain projet professionnel: développer le Character-design du prochain jeu à succès de Angry Birds . Cela peut paraître décalé, mais fait parti du charme et du dynamisme de l’album d’avoir des petites envolées, comme sa première soirée à Helsinki dans les « bras » de la patronne du bar où il débarque.

Des espaces vides que l’auteur a envie de combler, des questions sans réponses, car le grand-père n’a jamais souhaité s’étendre sur cette période de sa vie, et à l’heure où le fils de Miguel pose beaucoup de questions sur la vie, le narrateur revient sur celles qu’il aurait souhaité poser à son grand-père. Comme il arrive parfois, des personnes qui ont vécu une épreuve traumatisante préfèrent éluder ces souvenirs de leur vie, et la transmission de ces informations peuvent sauter une génération, surtout que la génération intermédiaire a d’éventuels souvenirs de leur enfance que eux aussi ne souhaitent pas aborder.

Et puis, il y a l’imaginaire, comment certaines photos des quelques années d’exil en Argentine arrivent à faire travailler les méninges de Miguel. Qu’est-ce que son grand-père a bien faire de son époque Argentine ? Qui a-t’il bien pu fréquenter ? A t’il pris part à l’Histoire de quelque manière que ce soit ? Ou bien a-t’il menti et n’était pas là où il prétendait être ? 

Un récit étonnant, intime et drôle à la fois, qui complète certaines interrogations de l’auteur ainsi que du lecteur. Une approche graphique dynamique qui est bien agréable tout au long de la lecture, et comme je le précisais, l’alternance entre le travail de mémoire et les scènes de la vie quotidienne rend une lecture teintée d’humour et d’amertume.

Et une petite prédilection pour ce dernier titre: Proies faciles de Miguelanxo Prado aux éditions Rue de Sèvres.

Tout d’abord, sachez que si vous ne voulez pas vous spoiler votre lecture, évitez de lire la double page d’introduction de l’auteur, en effet, ce n’est pas une simple histoire policière que l’auteur tient à raconter mais aussi une certaine prise de conscience sur notre société actuelle. 

Deux policiers, l’inspectrice Tabares et son adjoint Sottilo sont amenés à se rendre dans un appartement où le corps d’un homme célibataire a été retrouvé sans vie, seul devant sa télé, la boîte de pizza qu’il a commandé encore ouverte et pas encore finie.

Une histoire somme toute banale dans leur quotidien de policiers, mais les heures à venir vont changer leur façon de voir l’affaire. Il y bien eu une autre « accident » cette nuit là, avec un homme renversé par une voiture, mais ce sont d’autres morts qui suivent qui éveillent leur suspicion. 

D’autres personnes sont retrouvées sans vie, un homme qui faisait son footing sur la plage, une femme qui prenait son déjeuner dans une gargote en ville… Il s’avère rapidement après autopsie que ces morts ne soient pas « naturelles », mais qu’au contraire certains soient victimes d’empoisonnement. De plus il s’avère que toutes les victimes travaillaient dans le monde de la banque, chacun à un poste différent de la hiérarchie bancaire et dans des structures différentes.

Cette chronique sociale se déroule en 2013 en Espagne, elle aborde la crise financière qui a touché le monde ces dernières années et comment les petites gens l’ont prise de plein fouet. Quelle pourrait être la réaction des citoyens excédés d’être le jouet d’un système révoltant qui n’a aucune considération de l’Humain.

La solution pourra vous paraître excessive, voire révoltante, mais la question posée par Miguelanxo est légitime, et l’action de ses protagonistes est profondément humaine. Si l’on s’apitoie du nombre croissant de personnes se retrouvant dans la précarité, n’arrivant plus à joindre les deux bouts, s’endettant,  n’arrivant plus à nourrir leur famille ou les loger, pourquoi le peuple ne dit-il pas stop ? Ce sont bien les questions qui nous taraudent aujourd’hui, les réponses que l’on attend de ceux qui veulent se retrouver à la tête des nations, mais pourquoi alors laisser les autres décider à notre place si leurs solutions ne correspondent pas à notre vie et à nos attentes ? 

Cette histoire est essentielle dans cette approche de vouloir traiter de questions de société en l’alliant avec un récit plus classique. Que vous le preniez comme une histoire distrayante, un énième polar de qualité qui vous permet de vous changer les idées, ou bien comme un engagement de l’auteur à se servir de son média pour sensibiliser son lectorat, vous saurez apprécier la qualité de son oeuvre.

Bonne lecture et à bientôt.

 

 

 

Girly ? Ugly !!!

I hate Fairyland, t1le vert de ses cheveux, Skottie Young, éditions Urban Comics- Indies.

Le coeur de petite fille qui bat en vous en a assez de s’entendre dire « Oh qu’elle est mignonne », vous préférez regarder les yeux dans les veinules, celui qui bat encore, tout sanguinolent, dans votre main ? I hate Fairyland est pour vous.

Fairyland à la base, c’est quoi ? Ce monde merveilleux des contes de fées et autres héros des histoires de notre enfance: des licornes mignonnes, des farfadets adorables, des gentilles fées aimantes… un monde rassurant où l’on aimerait passer plus de temps, en compagnie de petits chatons, il n’y a pas de vilaines sorcières dans la maison en pain d’épices, tout est en couleur pastel, agréable à l’oeil… un monde merveilleux !

Et puis, il y a Gertrude ! tout comme Alice, ou Dorothée, Gertrude est une petite fille, tout ce qu’il y a de plus adorable. Elle joue dans sa chambre à des histoires de princesse, avec ses peluches en guise de compagnons d’aventure. Tout à coup, le sol se dérobe sous ses pieds, un trou vient d’apparaître au beau milieu de la moquette et l’entraîne inexorablement vers l’inconnu. Quoi de plus fantastique pourtant que de se voir offrir l’opportunité de glisser vers le monde de l’imaginaire, partir à l’aventure… sauf que… PAF !!

N’oubliez pas que j’ai précisé que c’était un trou, le passage pourrait se passer en douceur, mais là, pas vraiment. Après une trrèèèèès longue chute, Gertrude s’éclate la tronche sur le sol (pavé de bonnes intentions à la base, mais on est pas toujours bien préparé à une visite surprise, et puis on s’attend plus ou moins à ce qu’un visiteur sonne à la porte).

La reine Cloudia, souveraine de Fairyland, souhaite la bienvenue  à Gertrude. Les personnages de contes de fée adorent les enfants, et lorsque l’un d’eux se pointe dans leur monde, ils lui réservent un accueil chaleureux, si celui-ci désire néanmoins renter chez lui, pas de problème, on le guide dans la bonne direction, on est même prêt à lui fournir un guide pour lui faciliter la tâche. Il y a toutefois un minimum d’effort à faire, c’est un mode de fantaisie où l’on vous convie à l’aventure, mais pas bien méchante, rien d’insurmontable… quoique.

Pour trouver le chemin qui lui permettra de rentrer chez elle, Gertrude doit se mettre en quête d’une clé qui ouvre le portail qui la sépare du monde réel, une aventure qui ne devrait lui prendre qu’une petite journée, malheureusement, cela fait déjà 27 ans que Gertrude erre dans les méandres de Fairyland. Alors ne vous étonnez pas de sa « légère », mais alors « infime », exaspération. Et c’est peu dire.

Ce n’est pas un criquet comme pour Pinocchio, mais une espèce de petite bestiole ailée qui accompagne Gertrude, Larrigon Wentsworth III est le guide chargé de la conseiller. Les années passées en compagnie de cette incompétente irascible ont profondément changé Larrigon, cet adorable animal frise maintenant la dépression, s’enquillant clope sur clope, est blasé par la méchanceté de Gertrude, voire, va même l’inciter à repousser ses limites d’ingéniosité de cruauté.

Notre adorable enfant va donc inexorablement franchir tous les domaines de Fairyland, croiser bon nombre de races et de créatures les plus mignonnes les unes que les autres, mais pour qui les destin est plus ou moins le même: passer entre les mimines de Gertrude qui déborde d’affection pour tous ses nouveaux amis. 

Et comme la recette semble encore un peu trop fade, que diriez vous si on la réhaussait d’une larme de piment en y introduisant, un nouvel élément, une adorable enfant, la petite Happy, aux grands yeux de guimauve, qui respire l’innocence et la gentillesse, de quoi énerver encore plus la désespérée Gertrude. Seule l’une de deux pourra rentrer chez elle, et dans ce combat titanesque, seule l’une d’entre-elles pourra rentrer chez elle.

Skottie Young, l’auteur de ce magistral conte sous acide et autres champignons hallucinogènes, s’était déjà attaqué, mais dans une version beaucoup plus soft, au monde féérique en adaptant en Bande Dessinée Le Magicien d’Oz, publié en France chez Panini Comics.

De là, à croire que I Hate Fairyland, t1Le vert de ses cheveuxUrban Comics collection Indies, est un exutoire afin d’exprimer toutes ses frustrations d’avoir été si sage auparavant, il n’y a qu’un pas.

Je ne sais pas pourquoi, mais je sens que ce n’est pas le genre d’histoire que vous lires à vos enfants avant de dormir, et pourtant, tout est là pour satisfaire leur imaginaire et s’inventer par la suite tout plein de belles histoires, avec des couleurs pastels, des princesses, des zombies, des narrateurs massacrés à tire larigot, et des grands yeux mielleux à faire fondre le coeur de tout un chacun, là encore assurez vous de ne pas l’avoir laisser dans votre main, ça fait des tâches et elles sont difficiles à faire partir.

Faites de doux rêves.

 

Sandman: Dieux existent !

sandmancouvAlleluïa mes frères, ça y est j’ai eu ma révélation, Dieu existe, que dis-je LES Dieux existent ! Sandman est de retour mes biens chers frères ! Oui Neil Gaiman est revenu sur SON oeuvre magistrale, l’histoire pour laquelle il a consacré une bonne partie de sa vie (la série a débutée il y a 27 ans, déjà): Sandman !

sandmancouvcouvLes éditions Urban Comics publient en cette fin d’année deux ouvrages incontournables concernant Sandman, d’un côté Sandman ouverture, la reprise de la série avec J.H. William III au dessin, et Sandman les couvertures de Dave McKean.

Sandman (dans sa réédition chez Urban Comics) est une série en 7 tomes, une histoires qui regroupe en son sein plusieurs histoires qui de prime abord, si vous ne faites que les feuilleter, peuvent sembler dissolues, sachant que plusieurs dessinateurs ont collaboré à ce projet Dantesque. Ce récit est au pinacle de mon panthéon, je les ai lu au bas mot, quelques dizaines de fois, bien plus qu’une histoire, c’est le recueil de toutes les histoires: Neil Gaiman comme à son habitude partage sa culture sans en faire un étalage, plutôt un partage, remettant au goût du jour, Shakespeare, Les contes de Canterbury, Les contes de mille et une nuits et tant d’autres sources de la culture populaire mondiale. 

J. H. William III quant à lui est l’homme providentiel pour illustrer ce nouvel opus de la série, et le terme « illustrer » est le mot juste tant cet artiste frise le génie ou la folie, c’est selon, comme bon vous semble. Il est vrai que vous ne ressortez pas indemne d’une collaboration avec Alan Moore (un autre de mes dieux) et J. H. Williams III en a fait les frais sur la série Prométhéa, mais qu’il travaille sur un récit de magie ou bien de rêves, son style si particulier sert à merveille l’histoire, à tel point que Neil Gaiman reconnait que son dessinateur a réussi des prodiges pour des scènes qu’il pensait irréalisables.

Il se joue des codes, déstructure l’image, met en scène les onomatopées au profit de l’effet désiré, cet auteur est capable de prouver au moindre détracteur que la Bande dessinée est sans conteste un art majeur. 

Et que dire, oui ! Que dire du compagnon de (presque) toujours de Neil Gaiman: Dave McKean qui a immortalisé la série avec ses couvertures alliant une multitude de techniques graphiques, créatives, allant du dessin au montage photo, rajoutant des objets ou de la matière.

L’éditeur nous fait la joie de sortir pour l’occasion un livre avec l’intégralité de ses couvertures commentées par l’artiste himself ! Et comme on dit toujours (mais parfois on ne le dit pas): « Jamais deux sans trois »; Urban sort également Violent Cases, la première collaboration entre Gaiman & McKean.

Il ne faut pas vous effrayer d’un tel regroupement d’auteurs de génie, bien au contraire, il faut se laisser porter dans le royaume du maître du rêve .

Au début de la série d’origine, on découvre Dream, seigneur du royaume des songes, qui vient de s’échapper suite à plusieurs dizaines d’années de captivité sur terre, vous découvrirez comment et pourquoi à la lecture de la série. De par son absence, le monde des rêves s’est étiolé, tout est à reconstruire, ou presque, et il doit remettre la main sur les artefacts symboles de son pouvoir.

Dream (Rêve) est le membre d’une fratrie peu ordinaire: Destiny (Destin), Death(Mort), Dream (Rêve), Desire (Désire), Destruction (Destruction), Delirium (Délire) & Despair (Désespoir); 7 frères et soeurs, présents depuis avant la naissance des mondes, et Death sera la dernière présente lors de la fin de tout. 7 éternels qui régissent toute forme d’existence, mais dont tout le monde ignore la présence même si l’on devine parfois l’idée et l’influence qu’ils peuvent avoir. Comme dans toute famille, il y a des tensions mais aussi des relations fortes qui les unis.

Avec cette nouvelle histoire, nous découvrons un événement qui s’est déroulé avant la captivité de Dream, nous rencontrons également deux autres membres de la famille, leurs parents bien évidemment, sujet pourtant habilement évité lors de la série mère, et dont on aurait pu avoir cure, mais la pertinence de cette rencontre n’est pas anodine.

 

Sandman est une oeuvre dont on ne ressort pas indemne. Neil Gaiman ouvre son lecteur à une multitude de possibilité, lui réapprend la force de l’imagination et des possibilités. Dès lors que vous ouvrirez les portes du rêve, vous pourrez y revenir à n’importe quel instant, une fois l’histoire terminée, la reprendre depuis le début en ayant l’impression que ce n’est autre que la suite logique de l’histoire que vous venez de quitter. 

Les auteurs ont été capables de déstructurer la narration et l’image au profit d’une oeuvre magistrale quine risque pas de trouver son égal de si tôt. C’est un sacré investissement, car ce n’est pas seulement l’acquisition de livres que vous faites, c’est une part de vous même que vous venez de céder aux auteurs: votre temps, votre intellect, et peut-être votre santé mentale.

Voilà pourquoi je n’aime guère répondre à cette fameuse question: « Alors c’est quoi pour vous le récit indispensable à avoir dans sa bibliothèque ? » Nous n’avons pas les même goûts, ni les mêmes attentes ou exigences. Si je porte au pinacle Sandman, sur la même marche du podium, on y retrouve Gaston Lagaffe en charentaises en train de faire une sieste avec son chat sur les genoux et sa mouette sur l’épaule, c’est tout dire. 

 

 

 

Noël !!!!!

Nous sommes début décembre, Noël approche à grands pas et plus le temps passe, plus le stress va aller crescendo: « qu’est-ce que je viens pouvoir offrir ? » – « Comment ça, ce n’est plus disponible ? Pourquoi je ne m’y suis pas pris plus tôt ! » – « J’aimerais tellement trouver une série déjà terminée ! ».

grand-mechant-renardQu’à ne cela ne tienne, en cette fin d’année, comme à chaque fois, les éditeurs décident de remettre en avant certains de leurs titres, sous forme de coffret, d’intégrale, tous les coups sont permis, même en-dessous de la ceinture quand on parle de boxe comme dans Blue Note.

de-mal-en-pisNoël ! C’est l’excuse idéale pour (se) faire plaisir, s’en mettre plein les mirettes, plein la panse… mais par contre on se vide les poches ou le compte en banque, c’est selon. Mais, parfois, une intégrale résout le problème, et voici déjà une première sélection de ce que nous avons à disposition à la librairie. Est-ce par mollesse, ou fainéantise, je vais vous mettre les liens des articles que nous avons déjà pu publier concernant certains titres remis en avant et que nous avions apprécier auparavant.

Tous n’ont malheureusement pas eu l’opportunité d’être chroniqués, mais ce sont pourtant des titres que nous avons tous aimés.

grandmechantrenardRéédition de la version reliée du Grand méchant renard, de Benjamin Renner aux éditions Delcourt, une version « luxe » afin qu’elle résiste plus longtemps aux multiples lectures que vous en ferez, car n’en doutez pas vous y reviendrez aux aventures de cet adorable crétin, heu… renard.

GRAND MECHANT RENARD_interieur.inddUn goupil pas si habile à devenir la terreur des poulaillers, tirailler entre le loup avec qui il partage normalement, le statut de prédateur et la passion débordante que lui portent les poussins qui voient en lui la mère idéale. De l’humour loufoque à faire dans son froc, d’où, pour une fois, je ne dirais rien si vous partez le lire dans vos toilettes. Par l’auteur d’un album que j’avais adoré, Un bébé à livrer aux éditions Vraoum et qui était tout autant truculent, où comment un cochon, un lapin & un canard se retrouvent à remplacer au pied à patte levée une cigogne qui n’est plus en mesure d’exercer son merveilleux rôle de distributeur automatique de nouveau-né, et à n’en pas douter, ils sont tout aussi gauches que notre vaillant renard. 22.95 euros.

undertakerUndertaker: Le Block-Buster du western en BD de ces dernières années, un personnage charismatique et un dessin aux petits oignons, histoire de vous en mettre plein la vue, un scénario, pas des plus originaux, mais qui au contraire suis tous les poncifs du genre afin de satisfaire tous les amateurs de cowboy ténébreux au passé énigmatique, qui ont le chic pour se mettre à dos les crapules locales et séduire les belles (et les moins belles aussi). 29.99 euros le coffret contenant les deux premiers tomes de la série qui forment un premier récit complet.

Duel au soleil pour Xavier Dorison

blue-noteBlue Note (grand libraire). Même à la relecture cette histoire garde intact son charme, un dessin de toute bôôôté, un récit captivant. A l’origine, ce sont deux albums, chacun consacré à un personnage: le premier est un boxeur, ancien champion, il revient dans la ville où il a grandi et qui l’a vu atteindre les sommets de la gloire. Nous sommes à une vingtaine de jours de la fin de la prohibition et l’on sent le vent d’une nouvelle ère se lever dans le milieu de la vie clandestine de la ville. Dans le même temps, et c’était l’une des particularités de cette série, vous suivez l’arrivée d’un jeune noir, joueur de blues, guitariste exceptionnel qui aspire à faire carrière à la ville et espère même immortaliser sa musique sur un disque, véritable consécration pour un musicien à cette époque. En lisant chacune de ces destinées, vous apercevez  parfois la même scène par les yeux de chacun des protagonistes, ou bien les conséquences d’une de leurs actions. Et que dire du dessin si ce n’est sa puissance au service du récit et de l’ambiance. 24.95 euros l’intégrale

Fins de séries

blue-noteBlue note (jeune libraire). Et oui ! Cette histoire a eu la chance d’être chroniquée deux fois, c’est dire si on l’a aimée.

Déjà 4 immanquables pour cette rentrée 2013

abelardAbelard & Alvin. De la poésie ! De l’humour ! De l’amour ! DilliesHautière: un duo gagnant. Chaque étui comprend une histoire complète en 2 tomes à 27.98 euros.alvin

C'est beau & c'est bon !

texasTexas Cowboy. Avant de réaliser son très remaqué et remarquable album, L’homme qui tua Lucky Luke, Matthieu Bonhomme collabora avec Lewis Trondeim sur le Projet Texas Cowboy, afin de retranscrire l’histoire d’un journaliste qui immortalisa l’Ouest sauvage Américain. Une succession de portraits, véritables stéréotypes de celles et ceux qui sont rentrés dans la légende du Far-West. Un coffret regroupant les deux albums ainsi qu’un livret de 16 pages de croquis & dessins pour 45,00 euros.

Des retrouvailles, des trouvailles, vaille que vaille.

herakles-couleurHerakles. Edouard Cour: petit génie, va! Ah ça, on pourra dire que je l’aime ce titre et que je n’aurai de cesse de le mettre en avant. Et en cette fin d’année, Akiléos le met doublement en valeur, une version intégrale en couleur à 39.00 euros, et une version Noir & Blanc légèrement plus grande à 59.00 euros afin de profiter encore plus des talents du petit prodige.herakles-nb

Des albums qui nous font voyager !

kililanaKililana Song. Remarquable ! Epoustouflant ! A vous couper le souffle ! Vous en resterez le souffle court voire même exténuer au point de ne plus pouvoir respirer, ah mourir en lisant une BD, vous ne vous y attendiez pas à celle-la. Une belle intégrale regroupant les 2 volumes de Benjamin Flao pour la modique somme de 28.00 euros M’sieurs-dames, même pas 30.

Dans l'ombre de Charonne, Une métamorphose Iranienne, Furari, Kililana song, L'homme qui n'existait pas, Nobrow

de-mal-en-pisDe mal en pis d’Alex Robinson aux éditions Rackham. mal2Réédition de cette comédie au coeur même de New-York, une rencontre croissée entre plusieurs protagonistes, un libraire qui se lance dans une nouvelle relation sentimentale alors qu’il vient de s’installer dans une collocation. Un apprenti dessinateur qui vient d’intégrer une grande maison d’éditions, il se retrouve l’assistant d’un des pionniers de l’histoire du comics, et qui se retrouve à présent à faire du packaging de cornflakes et autres bétises. Une belle intégrale à 30.00 euros.

 

enfants-capitaine-grantSi vous souhaitez faire rêver vos petites têtes blondes, qu’ils s’inventent des aventures de l’autre côté des océans, les éditions Delcourt viennent de rééditer l’intégrale des Enfants du capitaine Grant, l’adaptation du roman de Jules Vernes.

enfants1Chaque case est un ravissement pour les yeux, des couleurs chatoyantes, un charme fou pour ces personnages anthropomorphiques: on a plus l’impression d’avoir ouvert un livre de peinture plutôt qu’une simple Bande-dessinée.

Une trilogie regroupée sous la forme d’intégrale pour 35.00 euros.

dedaleEt un manga pour terminer: Dédale de Takamichi aux éditions Doki-Doki; une histoire en 2 tomes présentés dans un étui pour 17.00 euros.

dedale1Deux jeunes femmes travaillant pour une firme qui conçoit des jeux vidéos, se retrouvent projetées sans savoir comment dans un mode sans dessus-dessous. Elles sont spécialisées afin de dénicher des bugs informatiques dans les programmes finis puis de remonter l’information vers les programmateurs pour qu’il procèdent par la suite aux rectifications.

Tout dans l’espace où elles sont isolées chamboulent les repères, escalier ou couloir sans fin, et tant d’autres mystères que je ne peux malheureusement pas vous dévoiler ici.

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Patience !

clowescouvConnaissez vous Patience ? Attention, je n’ai pas dit La Patience, mais Patience de Daniel Clowes ? D’ailleurs commençons par le commencement, connaissez vous Daniel Clowes ? Sachez que quelques aficionados comme votre serviteur se réjouissent de voir une de ses nouveautés arriver, et comme de par hasard, entre chaque, il faut savoir faire preuve de… patience.

PATIENCE_P79-80_Colors copyDaniel Clowes est l’un des piliers de la scène indépendante Américaine, auteur multi-primé maintes et maintes fois, son ouvrage le plus emblématique, Ghost World fut adapté au cinéma. Certaines de ses oeuvres sont autobiographiques, traitant notamment de son statut d’auteur indépendant, mais ceux que je vous conseille ardemment sont également les plus… comment dirais-je, dérangeants: Comme un gant de cuir pris dans la fonte, David Boring, Mr wonderful, Ghost World et pour le coup, Patience.

Tous ces beaux albums, vous les trouverez chez la maison d’éditions Cornélius, excellent éditeur qui a fêté ses 25 ans cette année, qui publie non seulement de très bons auteurs, mais également de très très bons auteurs, même si tout n’est pas toujours disponibles: Tezuka, Mizuki, Burns, Clowes, Crumb

clowes2Daniel Clowes a l’art et la manière de vous raconter des histoires avec un « faux rythme », mettant en scène des gens « ordinaires » dont la vie se déroule lentement, jusqu’à … PAF, le truc qui fait tout basculer: 2012, pour Jack Barlow et Patience, c’est l’annonce d’un heureux événement à venir: Patience est enceinte. Si qui en comblerait plus d’un, apporte un soupçon d’inquiétude à Jack, car jusqu’à aujourd’hui il n’a pas réussi à avouer à Patience qu’il n’avait pas obtenu le travail dont il lui avait parlé, et actuellement, il gagne de quoi subvenir au besoin du quotidien en distribuant des flyers pour un établissement de strip-tease dans la rue, et l’arrivée d’un enfant dans leur nécessitera un tout autre budget. Il décide de prendre son courage à deux mains (si vous le voulez bien) et de lui annoncer sa situation et de prendre la résolution de trouver un meilleur job (que dans la bible).

clowes7clowes6On ne s’arrête pas en si bon chemin, la nouvelle surprise qui attend Jack, c’est de trouver Patience inerte au milieu du salon, elle vient d’être assassinée chez eux. La question est de savoir si c’est un simple voleur ou bien une personne qui lui/leur en voulait, toujours est-il que pour les enquêteurs, les soupçons se portent sur Jack, et ils lui mettent la pression afin qu’il avoue. Les déboires juridiques ne cessent de croître, surtout lorsque l’on est sans le sou, on se retrouve facilement au 36 ème dessous (qui au départ se trouvait au 3 ème sous-sol) mais à force de clamer son innocence retrouvera la liberté, mais pas sa sérénité.

clowes5Il va tout faire pour retrouver l’identité de l’assassin, mais les pistes vont être multiples et se perdent au tréfonds de l’adolescence de Patience. Les années passent et Jack se morfond, et c’est en 2029, dans les bras d’une prostituée, qu’il entend parler de Bernie.

clowes3Bernie est repoussant, n’inspire vraiment pas la sympathie, mais Bernie détient un secret en mesure de répondre aux attentes de Jack: Bernie a trouver le moyen de voyager dans le temps, et c’est en 2006 que se trouve la réponse tant souhaitée, dans la période d’adolescence de Patience.

clowes4Daniel Clowes manipule son lectorat avec brio, vous immerge dans un quotidien lancinant, fait en sorte que cet univers que vous découvrez pour la première fois vous soit rapidement intime, afin que vous lecture se confonde avec la nonchalance des personnages et que vous basculiez peu à peu dans l’étrange et le dérangeant.

Bon anniversaire aux éditions Cornélius, habituellement c’est celui qui fête son anniversaire qui reçoit les cadeaux, cette année la maison d’éditions nous aura régalé, notamment avec les packs découvertes qu’ils nous ont proposé et de beaux titres comme celui-ci.

alexcouvQuitte à se laisser surprendre, voici Alex+Ada, de Jonathan Luna & Sarah Vaughn, un scénario à quatre mains, Jonathan au dessin, une publication des éditions Delcourt.

alex6Tout comme Daniel Clowes, Jonathan Luna peut en surprendre plus d’un de part son style graphique et sa narration, on le connait entre autre pour Ultra (rapidement résumé, on pourrait vous le décrire comme un Sex & the city version super héroïne), Girls, une histoire étrange, un village se retrouve isolé sous un dôme en verre (cela rappelle les Simpsons, le film) et au prise avec une invasion extra terrestre, les aliens sont sous la forme de femmes fortement dénudées et avides de reproduction, leur vaisseau spatial à la forme quant à lui d’un spermatozoïde géant, et plus récemment The Sword, où comment une paraplégique se retrouve doter de pouvoirs fantastiques en brandissant une épée convoitée par les assassins de sa famille, et en plus de ça, elle endosse le rôle de sauveur du monde à la place de Bruce Willis qui ne pouvait pas, parce qu’il avait aqua-poney ce jour là.

alex2Nous sommes « demain », donc ne soyez pas étonnés de voir votre grille-pain s’envoler pour vous amener le café au tombé du lit. Alex est un employé ordinaire, avec son petit train-train quotidien, et qui se remet tranquillement de sa dernière déception amoureuse.

alex3C’est un jeune homme totalement intégré dans la société, au fait des dernières technologies, c’est par le biais d’implants qu’il gère son quotidien, la domotique, son travail, ses communications, la conduite… tout se fait par contrôle mental. Mais il lui arrive d’être décalé, en tout cas d’avoir ses limites, et sa grand-mère en est le plus bel exemple, il ne partage pas le même engouement avec le fait qu’elle se soit octroyer un robot sexuel au prix exorbitant et qu’elle s’éclate littéralement entre ses bras.

alex6Sa grand-mère essaie de le convaincre du bien-fondé de son choix, lui expliquant qu’elle n’a plus a se soucier de la disparition de son conjoint, elle qui a déjà connu le deuil, le fait d’avoir une personne « idéale » avec qui partager sa vie, qui a les mêmes goûts qu’elle et qui ne souhaite que son bonheur.

alex1C’est l’anniversaire d’Alex, et alors que ses amis lui réserve une soirée surprise, mais le cadeau inattendu se trouve au milieu de son salon lorsqu’il rentre chez lui: contre son accord, sa grand-mère vient de lui offrir, version féminine, un robot/androïde X5, même génération que le modèle qu’elle a chez elle.

alex4Du premier contact et de sa première réaction, Alex souhaite ardemment se débarrasser de cet androïde ultra réaliste, mais il n’empêche qu’il lui a donné un nom, Ada, et que cela va créer un premier lien. Le quotidien du jeune homme va prendre une nouvelle tournure et une relation des plus étrange vient de naître.

alex5L’histoire à laquelle vous allez vous intéresser n’est pas simplement la vie de couple de Alex+Ada, mais toute la définition de ce qu’est être « Humain ». Une histoire en trois parties aux réflexions philosophiques, un avant goût de ce que pourrait être notre futur, et de notre cohabitation avec des créatures biotechnologiques.

sauvagescouvsauvages4La dernière surprise de ces derniers jours, c’est Le temps des sauvages, d’après le roman de Thomas Gunzig (Manuel de survie à l’usage des incapables), adapté par Sébastien Goethals, aux éditions Futuropolis.

Pourquoi une surprise ? il est rare qu’un album ne cesse de bout en bout de me rendre curieux, de m’infliger sans cesse des questions, à savoir quel genre d’histoire l’auteur essaie de me soumettre, dans quel univers je viens de poser le pied…

Cela commence par un braquage d’un fourgon blindé au bazooka avec couverture de sniper, on enchaîne avec un vigile d’un super marché (ou hyper, ou bien discount, comme vous voulez) chargé par les ressources humaines, de prendre une caissière en faute afin de la licencier, on se fait un fondu enchaîné avec des loups garous… mais qu’est-ce que c’est que ce livre que je viens d’ouvrir ?

sauvages5sauvage6Qui sont ces deux frères qui vous racontent l’histoire du mec qui a inventé les Nuggets de poulet et qui a tout simplement oublié de déposé son brevet et s’est fait doubler par le grand Ronald.

D’où personne n’est étonné de croisé une fratrie de 4 loups-garous dans le couloir de son H.L.M. ?

Quand votre compagne (en l’occurrence, car cela est valable aussi pour le compagnon) vous traite comme un gros nul, n’est-il pas temps de couper les ponts ?

Un patron, ou un petit chef de rayon, est-il toujours un con ?

sauvages2Avec un charme fou au dessin, nous voici entraînés, dans un polar, une chronique sociale, une histoire d’amours, de nature animale et de rapport de force.

sauvages1Un coup de coeur partagé avec le chevelu.

 

 

 

 

 

 

 

Sunny

sunnycouvSunny ! Alors que cela devrait nous évoquer un ensoleillement, voilà qu’un voile nuageux vient à passer. Sunny est la dernière série de Taiyou Matsumoto que nous avons pu lire en France, et avec ce sixième volume qui vient tout juste de paraître, nous disons au-revoir aux « Enfants des étoiles« .

ulyssecouvDes trémolos dans l’écriture donc, mais également de très belles histoires sont publiées dans cette continuité de fin 2016, avec une collaboration magistrale entre Emmanuel Lepage, un virtuose du pinceau, et René Follet, que l’on appellera « Monsieur » René Follet ou bien « Maître », tellement cet homme est talentueux, et ces deux hommes nous invitent à les suivre dans Les voyages d’Ulysse. Un autre voyage est au programme, proposé par Christopher & Pellejero AirLines: The long and winding road. Et pour rester dans le dépaysement, Inio Asano revient après Bonne nuit PunPun et La fille de la plage, avec une série (peut-être ?) plus grand public, Dead Dead Demon’s Dededede Destruction. En route pour l’aventure chers amis lecteurs.

sunny1Sunny ! de Taiyou Matsumoto aux éditions Kana, vient donc de se terminer, cette série atypique nous aura émus bien plus qu’elle ne semblait le présager… et c’est tant mieux. L’auteur a toujours su surprendre son lecteur avec chacune de ses histoires, que ce soit Amer Béton, qui existe aussi bien en version papier qu’en film d’animations, Le samouraï Bambou ou encore Number 5, et je ne vous parle que des titres qui sont encore disponibles actuellement.

sunny2Le dénominateur commun à toutes ces histoires, ce sont les enfants (même dans Number 5 où ce sont des personnages adultes mais comme le monstre de Frankenstein, des créatures qui se positionnent par rapport au « père » leur créateur).

Sunny, c’est l’histoire des Enfants des étoiles, un endroit qui accueille des enfants qui ne peuvent pas vivre avec leur famille, elle se déroule à la fin des années 60′ et au début des 70′ dans un petit bourg bien loin des grandes métropoles.

sunny3Sunny, c’est également le nom d’un modèle de voiture très populaire de l’époque, et dont un exemplaire prend la rouille dans le jardin de la maison des Enfants des étoiles. C’est leur sanctuaire, un lieu de refuge, une zone de jeu, l’endroit où l’on se rend pour fumer en cachette ou encore, afin de s’évader. Les enfants n’ont pas choisi d’être là, certains sont orphelins, d’autres ont été placés par les services sociaux en attendant de régler des conflits entre les parents. Nous sommes également dans une période du Japon, ou des personnes quittent la province à la recherche d’un emploi dans les grandes villes, mais ils n’ont pas toujours les moyens de se loger convenablement et se retrouvent obliger de se séparer de leurs enfants « momentanément », (il existe des cas où les personnes ont carrément changer d’identité afin de refaire leur vie ailleurs, mais ce n’est pas le sujet de ce manga même s’il y eu un grand nombre de cas à cette époque).

sunny6sunny56 volumes constituent la série Sunny, et dans chaque album vous avez six histoires, mettant souvent en avant l’un des enfants. Ce sont des histoires de leur quotidien, de leur relation à l’autre, par exemple, si certains vont à l’école, où ils peuvent croiser d’autres enfants qui vivent eux, avec leur famille: une règle est simple pour les Enfants des étoiles -« On ne se mélange pas avec ceux des maisons« .

La grande force de Taiyou Matsumoto entre autre chose, c’est d’avoir réussi à nous surprendre, à nous rendre intime avec chacun d’eux, de ne jamais avoir de redondance dans les sujets abordés et de réaliser un nouvel incontournable dans l’histoire du roman graphique.

Sunny s’adresse à ceux qui veulent découvrir une partie de l’histoire contemporaine du Japon, petite chronique sociale et rurale, à ceux qui désirent une proximité intimiste avec les personnages que l’ont découvrent lorsque l’on ouvre un livre ainsi qu’à ceux qui apprécieront que l’auteur est su jouer avec la corde sensible des sentiments, ce n’est pas une simple lecture, c’est un véritable partage. Et TOC !

ulyssecouvSi vous n’avez jamais vécu une tempête marine à bord d’un navire, sachez que la couverture du nouvel album d’Emmanuel Lepage an collaboration de Sophie Michel & René Follet peut vous en donner un très bon avant-goût.

ulysse1Emmanuel Lepage n’est plus un inconnu du grand public, et pourtant même avant ça, ces histoires comme Muchacho ou La terre sans mal ne pouvait pas laisser insensible son lectorat. René Follet est présent depuis bien plus longtemps dans le monde de la Bande Dessinée mais ne vous parlera pas spontanément à l’esprit, et pourtant… (que la montagne est belle).

Une bien belle histoire, magistralement illustrée à 4 mains. Emmanuel Lepage s’occupe de mettre en images l’histoire principale qui tourne autour de Jules Toulet, jeune artiste à la recherche d’Anna, qui tente de monnayer une place à bord d’un navire contre ses illustrations de peinture.

ulysse2René Follet quant à lui tient le pinceau de l’artiste Ammôn Kasacz, grand spécialiste de la peinture représentant la Grèce Antique et qui n’est autre que le dénominateur commun qui va rapprocher Jules Toulet de Salomé Ziegler, capitaine de … le suspens est insoutenable … l’Odysseus !

ulysse4Jules se trouve dans le port d’Istanbul, après quelques temps passés dans cette ville aux charmes ravageurs, l’envie du voyage et du changement est trop grande pour qu’il s’y attarde un peu plus. C’est notamment avec ses talents de peintre qu’il a l’habitude de monnayer un repas ou un hébergement, mais cette fois, aucun capitaine ne souhaite voir à son bord une bouche inutile à la manoeuvre du navire, Jules galère (tient un jeu de mot de mauvais goût, cela faisait longtemps) et traîne sur les quais. Une nuit que ses pensées vagabondes, il s’attarde et s’endort à même les planches et se voit surprit par la pluie, une jeune femme l’invite à se mettre à l’abri à bord de l’Odysseus qui se trouve à quai, surtout afin de mettre au sec les toiles qui se trouvaient éparses à ses côtés.

ulysse3C’est au gré de la conversation que Salomé et Jules vont évoquer le peintre Ammôn Kasacz, dont la capitaine, pour une raison personnelle cherche à mettre la main sur ses oeuvres consacrées à l’Odyssée d’Ulysse et retrouver la trace du peintre.

Il s’avère que Jules à en sa possession un carnet de croquis du maître ainsi qu’une éventuelle piste à suivre pour le retrouver. Salomé l’accepte donc à son bord moyennant une toile par semaine. S’en suit une aventure à bord de l’ Odysseus et tel Ulysse avant eux, un nombre d’escales et de rencontres improbables.

A n’en pas douter cet album sera l’un des plus beaux cadeaux de fin d’année que les auteurs nous auront offert et que vous pourrez partagez au moment de noël, l’aspect Bande dessinée et peinture se mariant à merveille afin de vous séduire l’oeil: Les voyages d’Ulysse aux éditions Daniel Maghen.

windingcouvVous souhaitez prolonger le voyage ? Christopher et Pellejero (l’actuel dessinateur de la reprise de Corto Maltese) nous entraînent dans un road trip bourré d’humour: The long and winding road; aux éditions Kennes, qui ne cessent de nous surprendre agréablement (un de ces quatre il faudra vraiment que l’on s’attarde à vous présenter leurs productions).

winding1Est-ce un hasard ? Il se trouve que notre personnage s’appelle Ulysse, et que son voyage à lui aussi aura tout d’une Odyssée.

L’équipage ne paye pas de mine avec ces trois petits vieux, mais comme toujours il ne faut pas se fier aux apparences, et à défaut d’un cyclope ou d’un Odysseus, il faudra se contenter d’un Van Wolsvagen.

Sunny Time ? cela commence pourtant avec un temps maussade, Ulysse vient d’enterrer son père, un homme qui avait tout du bourgeois étriqué avec une vie morne et insipide, alors quelle surprise lorsque, après la cérémonie, un colis vient à être livré, un message posthume de son père qui lui fait une demande originale.

winding3Dans le carton, Ulysse découvre une collection de K7 audio, des quoi ?? Pour ceux qui n’étaient pas nés et qui ne connaissent pas, imaginez, mais, imaginez fort fort, qu’avant que vous trouviez comme par magie de la musique sur internet, qu’avant les compact disc que vous connaissez seulement sous le nom de CD, et après qu’un groupe de potes se soient rassemblés pour faire de la musique il a existé deux médias, les disques vinyl (anciennement en cire) et les cassettes audio magnétiques . Bref, Ulysse a en sa possession une batterie de K7 des musiques des 60’s et des 70’s, Led zeppelin, les Bee gees, Grateful Dead, les Rolling Stones… A ce stade, sachez que vous avez à la fin de l’album une playlist que les auteurs vous suggèrent.

winding2L’autre cadeau, c’est le Van Wolsvagen de son père, tout ce pan de la vie de celui-ci, Ulysse l’ignorait, tout autant que la demande rocambolesque de porter les cendres du défunt jusqu’au lieu du concert mythique des 70’s de l’île de Wight en Angleterre.

winding4Il va croiser très rapidement le chemin de trois individus, qui étaient présents le jour de l’office funèbre, qui ne sont plus tout jeunes, et qui ne sont autres que les trois autres membres du groupe de rock auquel son père avait participé, ça aussi il l’ignorait. C’est une histoire bourrée d’humour, d’expériences insolites et de rencontres hétéroclites, à mi chemin entre Les vieux fourneaux de Lupano & Cauet, et Cendres de Alvaro Ortiz, Come Prima d’Alfred; le sujet du voyage initiatique après la mort d’un proche n’est pas nouveau mais n’en reste pas moins très originale dans cette interprétation, fous rires assurés et expériences psychédéliques carabinées.

dedededecouvEt si pour finir vous craignez les coups de soleil, quoi de mieux que de dénicher un petit coin d’ombre et pour ce faire pourquoi ne pas profiter de cet énorme vaisseau spatial en stationnement au-dessus du ciel de Tokyo ?

inio2Inio Asano, mon auteur fétiche de l’incomparable Bonne nuit PunPun (à ne pas mettre entre toutes les mains) La fille de la plage (pareil, pas pour les enfants trop sages) … , il revient (Albator, le capitaine corsaire, tin ninin) avec Dead Dead DeDeDeDe Destruction aux éditions Kana.

C’est une histoire d’amitié entre Kadade et Ôran, deux adolescentes, camarades de classe. Nous sommes dans un contexte où un vaisseau est apparu au-dessus de la ville depuis 3 ans, et alors que la tension est palpable pour les services de défenses de la terre, les extra terrestres restent plutôt inactifs.

inio4inio5Ce qui fait que chacun continue sa vie comme ci de rien était, si ce n’est de temps à autre une intervention militaire contre les infrastructures aliens, tout le monde semble s’être habitué à cette présence.

Nous suivons donc nos deux collégiennes dans leur quotidien, leur vie à l’école et dans leur vie familiale, des petites histoires ordinaires dans un contexte extraordinaire. Un univers graphique qui va de pair avec ce type de récit, c’est à dire que Inio Asano a un dessin au trait très fin, agréable à l’oeil, mais d’une richesse et d’une finesse de trait époustouflantes.

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