Vouloir profiter d’un média comme la Bande Dessinée pour présenter un récit politique, historique ou social peut être un choix judicieux pour capter l’attention du lecteur ou bien lui donner l’opportunité de découvrir ou bien d’approfondir certains sujets. En même temps que sort au cinéma « L’enquête », l’adaptation de L’affaire des affaires, la Bande Dessinée de Denis Robert et Laurent Astier, concernant l’affaire ClearStream, la maison d’éditions Dargaud en profite pour sortir une version intégrale regroupant les 4 tomes de ce récit reportage qui aura bien chamboulé la vie du reporter Denis Robert qui aura consacré beaucoup de temps et de sueur à ce projet; je me souviens notamment du soutien que lui apporta Charlie Hebdo à l’époque de ses premières révélations alors que le milieu journalistique avait plutôt tendance à le lâcher de toutes parts.
Black is Beltza (noir est noir, beltza-noir en Basque), un récit de Fermin Muguruza, Harkaitz Cano et Dr. Alderete, coédité par Bang ediciones & Talka records&films. Un projet peut-être pas évident graphiquement pour le grand public, mais encore une fois je ne saurais trop que vous vous conseiller d’aller au-delà de votre première impression.
Nous sommes en Octobre 1965 à New-York, comme encore maintenant, par manque d’évolution des mentalités, il se trouve que les géants de Pampelune devaient défiler dans les rues de la ville, mais compte tenu de la discrimination raciale, les 2 géants noirs sont interdits de défilé. Manex, l’un des porteurs, basque est révolté du manque de solidarité des autres artistes, il décide de flâner un peu et ses pas vont le mener jusqu’à Harlem et jusqu’à l’Apollo Theater pour le concert de James Brown; James brown ladies & gentlemen !!!!!! Il va faire quelques rencontres intéressantes, des personnes engagées politiquement et autres qui vont l’amener vers une nouvelle vie.
Par amour et par conviction, il va voyager de par le monde et se retrouver dans les différents réseaux de résistance, de combats d’indépendance, croiser Castro et Le Che à Cuba, participer au festival de Monterey et connaître le mouvement Hippie, écouter Jimi Hendrix, partir pour l’Algérie…
L’idée est entre autre de dévoiler comment les réseaux se sont mis en place et pouvaient être reliés entre eux. Ce n’est pas dans l’album, mais déjà les membres de l’I.R.A. ou de la United Red Army japonaise et tant d’autres, allaient se former au Moyen-Orient. On suit un parcours riche en expériences on revit l’Histoire et un grand nombre de sujets évoqués dans cet album parlera d’une façon ou d’une autre à n’importe quel lecteur. Un projet qui m’a beaucoup parlé et que je vous recommande chaudement.
Vaincus mais vivants, Chili 1973, de Loïc Locatelli & Maximilien Le Roy aux éditions Le Lombard. Pourquoi je fais le choix d’une telle chronique, en dehors de mettre en avant des ouvrages qui m’ont plu, pour différentes raisons, c’est aussi pour le travail de mémoire mais également pour celles et ceux qui n’ont pas connu ou vécu ces époques. Salvador Allende, président socialiste, qui a accédé au pouvoir démocratiquement, fut évincé par le général Pinochet, il refusa que ceux qui le soutenait se sacrifient face aux forces militaires, il fut un exemple et une épine dans le pied de bien des gouvernements et il y eut beaucoup de suspicions concernant une ingérence de la C.I.A. concernant son renversement.
Vaincus mais vivants, c’est avant tout l’histoire de Carmen Castillo, de ses compagnons et de ses rencontres, Miguel Enriquez, Régis Debray… comment elle s’est retrouvée exilée et l’on ne peut imaginer l’émotion qui a dû la gagner lorsqu’elle a enfin pu remettre les pieds dans son pays. Plus que de la Bande Dessinée de reportage, c’est un travail de mémoire que les auteurs nous offrent là, et non seulement cette histoire est à lire, mais elle est à partager.
De 1962 à 1987, des bancs de la faculté au retour sur le lieu de l’assassinat de son compagnon, nous suivons Carmen, alors étudiante elle écoute et admire Beatriz Allende (la fille de Salvador), elle partage au cours des soirées estudiantines les idées « révolutionnaires » ou plutôt militantes pour un désir de démocratie, mais si ses amis envisagent la révolution, ils se retrouvent confrontés au désir de Salvador Allende d’accéder au pouvoir par les urnes et non par la force. S’en suivra le combat et la résistance dans l’anonymat, les déménagement incessants, les arrestations ainsi que la torture. Carmen sera exilée, Pinochet n’ayant pas d’autre choix vu la pression internationale et le soutien qu’elle obtiendra, elle se réfugiera en France jusqu’à son retour des années plus tard sur les lieux du drame.
Frida Kahlo, Pourquoi voudrais-je des pieds puisque j’ai des ailes pour voler? collection Mirages aux éditions Delcourt. Jean-Luc Cornette & Flore Balthazar vont nous dépeindre (bien sûr puisque elle s’agit d’une artiste) une partie de la vie de Frida Kahlo, il eu été trop simple de revenir une nouvelle fois sur son parcours artistique, et je ne l’aurais pas joints à cette chronique.
En dehors de sa carrière de peintre, nous allons nous concentrer sur une période singulière de sa vie, lorsqu’elle côtoya Léon Trotski, forcé à l’exil, c’est au Mexique, seul pays à avoir accepté de le recueillir, qu’il arriva afin d’y rester 4 années avant d’être assassiné.
C’est une histoire à 3 voix, Frida, son époux Diego Rivera et Léon Trotski, une histoire passionnelle, un engagement politique, une approche artistique. Une nouvelle fois on découvre que l’Amérique du Sud a été un endroit propice à la défense d’idées révolutionnaires et socialistes, que bon nombre d’intellectuels se sont rendus là-bas et ont échangé pas mal d’idées.
Delphine Le Lay & Alexis Horellou, les auteurs de Plogoff (un village de Bretagne face au nucléaire, chronique d’une résistance populaire) sont de retour avec un nouveau récit engagé, en compagnie de Marion Boé: 100 maisons, La cité des Abeilles; toujours aux éditions Delcourt.
Cette histoire a débuté en 1950 à Quimper, eh oui nous restons chez les Bretons, la guerre a fini il y a peu d’années, le pays se reconstruit petit à petit mais la situation n’est pas rose pour tout le monde: crise sociale, crise du logement… la vie suis son cours péniblement.
Mais voilà ! Victor rentre chez lui tout guilleret, il bondit partout et sa femme a bien du mal à le calmer afin de savoir de quoi il en retourne. Un projet émergeant aurait pour but de lancer la construction d’une nouvelle cité permettant à moindre frais, mais avec la contrepartie de la participation de chacun aux travaux, de terrassement, de monter les murs… enfin tout quoi.
Mais ce n’est pas tout, ce n’est pas seulement l’opportunité d’avoir sa maison et puis basta, l’idée est d’aller plus loin et de rapprocher chacun, un élan de solidarité à grande échelle et qui perdurerait dans le temps pour la vie de chacun. Une bien belle idée qui ne se fera pas en 1 jour et qui ne sera pas sans quelques petits désagréments. Mais ce projet est bien réel et a fêté ses 60 fin 2014.
Et je termine (enfin) avec ce dernier titre: Le choix, de Désirée & Alain Frappier, aux éditions La ville brûle, en partenariat avec Le planning familial.
Les deux auteurs avaient déjà réalisé un album remarquable, Dans l’ombre de Charonne, un témoignage bouleversant sur les événements lors des manifestations de Paris, en pleine guerre d’Algérie, d’une femme qui s’était retrouvée bloquée sous les corps devant l’entrée du métro Charonne, et qui s’était vu dénigrée, compte tenu de la position des médias et du gouvernement qui, à l’époque, niaient la réalité des victimes.
Compte tenu de ce qui c’est passé il n’y pas si longtemps en Espagne, au Maroc, ou encore la position de certains hommes politiques, il est de bon ton de revenir sur le droit à l’avortement. Il est certaines lois, ou certains combats qui datent depuis si longtemps qu’un grand nombre ignore ce qu’il en à été et ce qu’il en à coûté d’obtenir des droits ou une reconnaissance de certains problèmes. « Oui mais, bon ce ne sont que des femmes, et puis elles l’ont bien cherchées, ou elle était consentante… » Le nombre d’inepties qui ont pu être dites. La « loi Veil » a changé la destinée d’un grand nombre de femmes.
Cet ouvrage va au travers du parcours d’une jeune femme revenir sur l’histoire de cette avancée humaine et sociale, aborder le parcours personnel, le débat national, les discussions en petit ou grand comité. Il met en avant diverses personnalités à travers ces dernières années, montre les arguments qu’il a fallu donner pour convaincre du bien fondé de ce droit.
Les auteurs vont souvent à la rencontre du public et sont désireux d’alimenter le débat, n’hésitez pas à aller sur ler site pour en découvrir un peu plus et voir si vous avez l’opportunité de les croiser: http://dafrappier.weebly.com/.
Voilà plein de nouvelles idées, à vous de voir et bonne lecture.