Entrez dans la danse, les soucis n’ont pas de chances, la musique commence, ça c’est Fraggle Rock ! Que de souvenirs, mais que de souvenirs mes aïeux. Ah, il faut bien être quarantenaire pour avoir connu les Fraggle Rock, mais pour le coup, de puis que le dernier Richard Guérineau est arrivé en librairie, dès que je vois la couverture, je ne peux m’empêcher d’avoir cet air en tête.
Entrez dans la danse, Richard Guérineau d’après Jean Teulé, éditions Delcourt, collection Mirages.
Les éditions Delcourt présentent dans leur catalogue plusieurs adaptations des oeuvres de Jean Teulé: Le magasin des suicidés, Le Montespan, Je, François Villon, mais trois autres titres ont émergés sous les coups de crayons de Richard Guérineau, Charly 9, Henriquet et aujourd’hui… Entrez dans la danse.
Bien évidemment que l’on peut ne pas adhérer au style littéraire de Jean Teulé ou bien encore ne pas avoir de curiosité sur les sujets qu’il a abordé, mais pour ma part, après y avoir pis un oeil une première fois, j’y retourne allègrement.
Reprendre la destinée d’un personnage historique, un moment de sa vie, ou dans le cas qui nous intéresse, revenir sur des faits complètement improbable, voilà la démarche singulière de l’auteur. Dans Entrez dans la danse, grand nombre de lecteurs vont certainement découvrir, tout comme moi, ce phénomène qui toucha la ville de Strasbourg au début du XVI ème siècle. Cela vous est -il déjà arrivé, qu’au cours de votre journée, tout se déroule normalement, quand tout à coup… vous vous levez et vous mettez à chanter, à danser, vous êtes pris d’une inextinguible frénésie qui vous fait décrocher le contact avec votre entourage. Non ? Et bien que diriez vous si l’on vous apprenait que c’est ce qui est arrivé à plusieurs centaines de personnes en Juillet 1518 à Strasbourg, et qu’ils ne se sont pas lever comme ça, pour la déconne, qu’ils ont entamés une chenille, autour de la place de l’hôtel de ville et qu’au bout de 3 tours, tout le monde est rentré chez soi, non, non, pas du tout, cette danse frénétique à duré 2 mois.
Les dirigeants de la cité, les religieux, les médecins… comment tout ces braves gens ont-ils décidé de gérer la détresse de leur concitoyens ?
Richard Guérineau nous offre encore un très chouette livre, j’aimais ses variations graphiques présentent dans Charly 9 et Henriquet qui servaient l’histoire, effectivement ici, cela ne s’y prêtait guère, mais son style dynamique, avec les trognes qu’il a distribuées au casting et l’humour tant narratif que visuel vont donneront l’occasion de passer une nouvelle fois une très bon moment de lecture.
Prince of cats, Ronald Wimberly, éditions Dargaud.
Que vous en ayez lu ou non, je ne pense pas que vous soyez en mesure d’ignorer qui William Shakespeare, ne serait-ce que par l’adaptation cinématographique avec Léonardo Di Caprio, dit « le beau Léo ».
Prince of cats, ou Le prince des chats, n’est autre que le personnage de Tybalt issu de Roméo & Juliette, sur les bancs de l’église, Tybalt s’assoit du côté de la mariée. Dans cette adaptation, vous allez sentir le dépaysement au même titre que le film que je vous mentionnait à l’instant, Prince of cats vous propulse au coeur des années 80′.
Sortez les Ghettos Blasters !! Pas ces petites merdes hyper boostées qui, pas plus grosses qu’une trousse d’écolier débordent de puissance, vous savez bien, la plupart des livreurs à vélo se ballade avec. Non moi je vous parle du vrai Ghetto Blaster, celui de 20 kilos minimum, qui vous déboîte l’épaule, qui prend plus de place qu’un pilier de rugby quand vous le posez à côtés de vous, et qui, lorsque vous pousserez le volume à fond, fera sauter les plombages de mémé.
L’idée est vraiment bien sentie, remarquez plutôt, une ville comme New-York peut largement rivaliser avec la Vérone de Shakespeare. Entre la multiplicité d’ethnies, de mouvements identitaires, communautaires, artistiques et bien d’autres encore que recèle New-York en son sein, y projeter la rivalité qui uni les familles Capulet et Montagüe était des plus judicieuse, notamment dans un contexte de culture Hip Hop.
La défense de ses couleurs, de son gang ou de sa famille, les battles de break-danse ou les conquêtes de territoires via l’apposition de tags bien sentis, voilà le genre d’ambiance que Ronald Wimberly nous balance dans la gueule. Non seulement ses idées sont superbement mises en scène, mais son dessin est une tuerie, avec une dynamique… on a vraiment l’impression d’avoir Public Ennemy ou N.W.A. à fond à côté de soi. Le choix de couleurs pétantes en alternance avec ses à plats de noirs, tout dans cet album est là pour me plaire.
L’amirale des mers du Sud, Carlos Nine & Jorge Zentner, éditions de la Cerise, collection La cerise sur le gâteau.
Qui n’a jamais souhaité voir le soleil souverain guidé ses pas, au coeur du pays Inca, vers la richesse et l’histoire des Mystérieuses Cités d’Or… non je déconne. Si vous souhaitez du dépaysement, vous allez être servis, mais pas dans la recherche de l’Eldorado, on va laisser cela à Guarnido & Ayrolles. Carlos Nine & Jorge Zentner évoquent eux aussi des aventuriers avides de rêves, de richesses et d’aventure, mais qui, après la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb vont aller par au-delà du continent pour partir à l’exploration de l’immensité de l’océan Pacifique.
Une mission d’exploration, les premiers contacts avec les autochtones, les promesses de fortunes à venir, nous allons suivre cette flottille parti après 20 de tractation afin de trouver les fonds nécessaires pour lancer cette aventure et tenter de retrouver un archipel sur lequel ils s’étaient arrêtés avant, et grâce à l’autorisation du roi, en revendiquer la possession, pour les « sauvages » qui vient sur place, on trouvera bien un arrangement.
Mais, même si cela se passait ce de nos jours avec toute la technologie à notre disposition, retrouver une île au coeur de la plus grande surface maritime du globe et qui peut être la plus hostile. Ce récit épique digne des plus grands romans d’aventures fut la première collaboration des deux auteurs et d’après la petite introduction du livre Carlos Nine qui était en pleine recherche créative graphique ne reconnait pas la paternité de L’amirale des mers du sud. Et pourtant il n’y a vraiment pas de quoi avoir honte tellement c’est Beau.
The red rat in Hollywood, Osamu Yamamoto, éditions Véga.
La maison d’éditions Véga continue d’agréablement me surprendre avec entre autre Peleliu, mais aujourd’hui je souhaite vous présenter une perle: The red rat in Hollywood, où la chasse aux sorcières pendant la période du Maccarthysme dans le milieu Hollywoodien.
A compter du tome 2, vous bénéficierez d’un dossier en fin de volume d’explications afin de déterminer quels sont les documents officiels sur lesquels l’auteur se base, quelles sont les parts de liberté qu’il prend.
Dans un contexte de Guerre Froide, l’histoire des Etats-Unis s’est auréolée d’une sacrée réputation avec sa chasse aux communistes. Avec l’hégémonie du monde du cinéma à cette époque (déjà) et d’Hollywood en particulier. le gouvernement avait bien mis en tête, de la même manière que l’on pouvait le constater de l’autre côté du mur de Berlin, la suspicion de l’autre et ce quel qu’il soit. Alors dans un cadre phobique, quoi de plus naturel de penser que si les communistes essayent de « laver » le cerveau des « honnêtes » citoyens, ils ont investi le milieu du cinéma, regroupant comme tout le monde le sait: des dépravés, des pervertis, des drogués… les raccourcis sont faciles.
La mise au ban du personnel d’Hollywood va commencer. Pour les idées subliminales qui seraient glissées dans les films, les premiers ciblés seront donc les scénaristes, puis les réalisateurs.
De cette première présentation devant la commission, la solidarité du milieu Hollywoodien afin de soutenir leur dix confrères entendus, le premiers des nombreux jalons qui vont constituer la chasse aux sorcières vient de se clore: s’exposer publiquement, c’est s’afficher politiquement, et qu’importe l’argumentaire de l’amendement de la constitution qui protège leur droit. Les délations vont suivre, les vies personnelles et professionnelles vont se briser, mais envers et contre tout, certains ne baisseront pas les bras et continueront de lutter. Une docu-fiction hyper/super/méga intéressante et très bien documentée, avec un dessin semi réaliste qui permet d’apprécier encore plus le casting Hollywoodien. La série est en cours de parution et le quatrième tome vient de sortir.
La fin du monde en trinquant, Krassinsky, éditions Casterman.
Un gros délire autour du phénomène qui frappa (et c’est peu de le dire) la région de Toungouska à la fin du dix-huitième siècle: une météorite.
Une histoire anthropomorphique, au casting, un cochon, savant de son état et astronome en particulier. Un chien jeune apprenti arrivé aux côtés du maître, par obligation, jeune noble mais totalement crétin. Le casting recèle encore nombre de protagonistes hauts en couleur.
On pourrait penser qu’astronome, c’est un boulot ou une activité pépère, le cul dans son fauteuil on observe les coins les plus reculés de l’univers, on spécule sur les origines de la création et on en discute autour du feu. Seulement quand dans son champ de vision apparaît un phénomène qui pourrait finir sa trajectoire en plein dans votre tronche, vous voilà bien obligé de vous extirper de votre cocon.
Dans le cas de notre astronome, il se soucie de son prochain et après maints calculs, arrive à déterminer quelle région risque de pâtir des conséquences, et il se rend au gouvernement afin que les moyens nécessaires soient déployés. La région en question n’est autre que l’endroit ou l’on envoie en goulag, les opposants au régime, les meurtriers, les voleurs… la lie de la société, donc quel intérêt de se préoccuper de leur sort, si cela lui tient tant à coeur, il n’y a qu’à aller tout seul les prévenir, les aider à s’organiser. Vous vous doutez bien que tout ne se déroulera pas exactement comme il l’espérait.
Léonard2Vinci, Stéphane Levallois, éditions Futuropolis/Louvre éditions.
Je termine par la tuerie de la semaine, un album magistral, rien que ça. Originalité scénaristique! Dominance graphique ! Mister bombastic (ah tient, cela n’a rien à faire là).
Stéphane Levallois n’est pas un inconnu pour les lecteurs des éditions Futuropolis et il a déjà eu l’opportunité de mettre en avant le monde de la peinture avec Le modèle ainsi que Les disparues d’Orsay.
Le partenariat entre les éditions du Louvre et Futuropolis a ceci de particulier de toujours faire appel à un auteur à l’approche graphique et narrative originale, lui offrant l’opportunité de s’approprier le thème abordé, en l’occurrence Léonard de Vinci, Stéphane Levallois décide donc de nous offrir une réalisation généreuse.
La générosité commence par le choix de son histoire: non content de pouvoir présenter une biographie de l’illustrissime peintre, celle-ci serait tellement dense que nous aurions un tout autre ouvrage entre les mains. Du coup, vous aurez en partie une biographie par morceaux choisis, dans un contexte particulier, un récit de Science-Fiction se met en place.
L’humanité a quasiment disparue, erre à travers l’univers à bord d’un navire conservant en son sein les vestiges de notre Histoire. Alors que « quelque chose » poursuit les hommes et tente d’éradiquer l’humanité, on décèle sur un tableau de Léonard, une empreinte de doigt avec une trace d’ADN du maître. L’idée qui émerge de leurs réflexions: cloner Léonard de Vinci, peintre de génie certes, mais également inventeur des plus avant-gardistes. Serait-il en mesure de trouver une arme permettant de les sauver et d’éliminer le péril qui les menace.
Si vous avez déjà l’eau à la bouche par les éléments que je vous ai dévoilés, sachez que la générosité de Stéphane Levallois ne s’arrête pas là, l’auteur dévoile également l’étendu de la palette de ses techniques de dessins, de peintures… C’en est presque une leçon. Dans tous les cas, il est présentement l’un des plus beaux albums de cette fin d’année 2019.