Depuis la série télé Walking Dead adaptée du comics de Robert Kirkman, l’engouement pour nos amis les morts vivants ne cesse de croitre, on en mange à toutes les sauces et côté cuisson la prédilection se porte plutôt vers le saignant. Du coup les auteurs sont nombreux à vouloir profiter du vent en poupe du genre, et il y en a pour tous les goûts et de plus ou moins bonne qualité, seulement voilà que l’un des maîtres du genre pointe son nez et donne une leçon à tout le monde: George A. Romero, le réalisateur de La nuit des morts vivants (1968) vient de produire en collaboration avec Alex Maleev une histoire inédite pour son bestiaire: Empire of the dead, l’édition française est publiée par Panini Comics.
Alex Maleev a souvent travaillé avec Brian Michael Bendis, notamment sur Daredevil, et son trait se prête très bien pour les histoires urbaines et les ambiances sombres, pour cette histoire tout va se dérouler à New-York, on y coupera pas, pour leur scénario « catastrophe », les auteurs américains aiment bien être le centre du monde ou bien y jouer les sauveurs, mais bon…
Nous plongeons directement dans l’action, New-York est sans dessus dessous, certaines zones sont protégées, d’autres infestées de morts vivants, la nourriture se fait rare, mais les habitants arrivent tout de même a trouver des mets de substitution. Comme on est pas là pour se morfondre, ils ont également trouvé le moyen de se distraire et comme dans la Rome Antique, quoi de mieux que des combats en arène pour captiver la foule, et ainsi organiser également des paris.
C’est dans ce contexte que nous découvrons Penny Jones, une scientifique de l’université de Columbia qui arrive afin d’étudier les zombies et, peut-être, découvrir que certains d’entre-eux sont encore suffisamment doués d’intelligence pour permettre une cohabitation, et accessoirement améliorer la qualité des jeux du cirque, car pour obtenir ce privilège il a fallu faire des concessions pour que les maîtres de la ville tolère son expérience. Elle rencontre le meilleur fournisseur de l’arène qui sillonne les rues de la ville, encadré par une équipe du SWAT chargée de sa sécurité, aimablement fournis par le maire. L’un des membres de son équipe, une femme, a disparue il y a quelques temps avant de revenir sous son apparence « zombièsque », et faisant preuve des qualités que Penny Jones recherche, le choix se porte donc sur elle.
Regardez avec attention le cou de notre zombie sur la couverture, vous ne remarquez rien ? un petit détail, ou plutôt deux auréolés de blanc ? Une morsure de vampire ! Eh oui, il y a du vampire là-dessous, et en règle générale, ils font partie des espèces dominantes, et vicelardes par la même occasion. Je ne vous dévoilerai pas la place qu’ils occupent dans notre histoire, à vous de le découvrir si vous franchissez le pas, mais si vous y laissez un orteil, un pied, une jambe ou un bras dans l’histoire, je n’y suis pour rien, la consolation c’est que ce ne sera pas perdu pour tout le monde: bon appétit.
Et en parlant vampire, le tome 6 d’American Vampire, Une virée en enfer, de Scott Snyder & Rafael Albuquerque vient de paraître aux éditions Urban Comics, un récit peut-être un peu court aux yeux de certains, mais suivi de plusieurs histoires courtes de 6-12 pages maximum, mais qui regroupent une belle collection d’auteurs.
Urban Comics s’en donne à cœur joie sur les œuvres de Jonathan Hickman, nous avons le droit en ce moment à East of West, son uchronie fantastique post guerre de sécession agrémentée de la présence des 4 cavaliers de l’Apocalypse, d’autres titres arrivent encore d’ici début 2015, mais il y a quelques temps j’avais pu apprécier Pax Romana, une œuvre complexe et très dense autour de la religion, scénario de Science-Fiction et de voyage dans le temps avec une réflexion sur le pouvoir.
En cette rentrée éditoriale, voici le récit qui semble t’il l’a révélé aux Etats-Unis: Nightly News. Il existe dans notre société moderne d’autres formes de « religions » et de pouvoir, à savoir en l’occurrence: les médias. Il n’y a pas si longtemps je vous ai chroniqué La machine à influencer, une histoire des médias de Brooke Gladstone & Josh Neufeld aux éditions Cà & Là, un regard pertinent et très pointu sur l’histoire et l’évolution du journalisme (à mettre entre toutes les mains). Avec Nightly News, nous sommes dans la droite lignée de ce titre étant donné le côté pointu des informations dont se sert Jonathan Hickman pour la base de son récit, et pour la pertinence de la critique qu’il met en place.
Le pouvoir politique et les médias sont étroitement liés et se rendent des services mutuels, ce n’est pas une nouveauté, mais quitte à vouloir critiquer, quelle solution apporter ?
Voici comment débute notre histoire, un groupuscule terroriste entre en scène et fait un carton médiatique dans les deux sen du terme: Leur intervention ne passe pas inaperçue et est relayée sur toutes les chaînes d’informations, et pour cause, trois tireurs embusqués abattent les correspondants des journaux télévisés en direct à la télé, ainsi que quelques membres de leurs équipes, caméraman, perchistes… C’est le drame parmi les grandes maisons de productions, comment ose t’on s’en prendre à ces « combattants » de l’information qui couvrent au péril de leur vie les conflits aux 4 coins du monde, mais dans le cas présent loin de toute guerre, c’est sur le territoire américain qu’ils tombent comme des mouches et dans un contexte où nulle mise en péril n’était prévue.
Le montage du récit est particulier, on jongle avec les évènements avec beaucoup de sauts chronologiques, on passe d’un évènement à un autre en alternant avec les rouages qui lient les médias aux politiques, et en découvrant le fonctionnement très particulier de l’organisation de La première Eglise de la Fraternité de la Voix, comment elle fonctionne, comment elle recrute ses membres, à savoir qu’aucun membre n’a de contacts avec la tête pensante de l’organisation. La construction graphique de l’album (la même que pour Pax Romana) peut-être déconcertante pour beaucoup mais va de pair avec le contenu et le nombre considérable d’informations et de documentations que l’auteur donne à ses lecteurs, on a qu’une seule envie, de recouper les éléments afin de savoir qu’elle est la part véridique des données. A n’en pas douter, on passe un très long moment de lecture à décortiquer cet ouvrage comme on peut le prendre comme un simple moment d’immersion dans un scénario de politique fiction.
Si au lieu de ça, ou en plus, vous souhaitez plus de « légèreté », passez à Solo de Oscar Martin aux éditions Delcourt, un habile mélange de récit plus proche de l’Héroic Fantasy à la sauce Mad Max, avec en guest star un rat (beeuuaarrkkk).
Solo est un rat, il se tient sur ses pattes arrières, est équipé aussi bien d’arc et de flèches, d’armes blanches que de flingues, avec son père, ils chassent afin de subvenir aux besoins de leur famille qui vit recluse dans un endroit isolé, seule la loi du plus fort permet de survivre dans ce monde dévasté. La pénurie de nourriture ramène une tradition pour la survie de leur famille, le fils ainé est maintenant obligé de quitter le nid pour que les autres puissent survivre des maigres rations qu’ils arrivent à dénicher. Solo est maintenant assez fort et habile pour prendre la route et se débrouiller seul, la chose ne sera pas facile et la fourberie occasionnelle des rencontres hasardeuse fait qu’il devra se méfier à chaque instant. Mais même avec la plus grande vigilance, il ne pourra échapper à son destin et se retrouver prisonnier dans une des nombreuses arènes disséminées aux 4 coins du pays. Ses facultés de combattants seront ses seuls atouts pour survivre à la dure loi du combat, mais s’il survit, il pourra peut-être regagner sa liberté.
C’est un tome 1 mais vous avez néanmoins une histoire complète qui aurait déjà très bien pu se suffire à elle même tant l’histoire est complète, très bien écrite, le rythme est génial et les personnages très bien développés. De plus l’auteur nous propose en supplément à la fin de l’album, une documentation fournie de détails supplémentaires concernant les différentes races que l’on croise dans l’album afin de s’immerger un peu plus dans son univers.
Franchement belle surprise et gros coup de cœur pour moi et le jeune libraire pour Solo.
Quand on vous dit que Urban Comics a un rythme soutenu dans ses publications, en voici un nouvel exemple avec Human Target de Peter Milligan, Edvin Biukovic, Cliff Chiang, Javier Pulido & Cameron Stewart, ou comment remettre au goût du jour à la fin des années 90′ un personnage des années 50′. Cette série inspira même deux séries télé par la suite: Le caméléon & Human Target. Je vous parle d’un rythme soutenu car nous avons eu les tomes qui composent cette série en moins d’un mois, chaque volume regroupant plusieurs récits.
Christopher Chance n’est pas un homme ordinaire et n’exerce pas un métier ordinaire. Il a la particularité d’être en mesure de modifier son aspect physique à l’aide d’artifice, maquillage, perruque, prothèse… mais à un point bluffant de vérité, mais son talent va bien au-delà d’une simple apparence, il est capable de se doter d’une personnalité qui n’est pas la sienne et qui bluffe aussi bien la personne dont il copie l’apparence que leur entourage.
Quel est l’intérêt d’une telle capacité ? Christopher Chance gagne sa vie en vendant ses services à des personnes qui ont besoin d’une doublure, le plus souvent parce qu’elles sont la cible de tentative d’assassinat, mais cela lui permet également de mener des enquêtes à leur place ou encore de louer ses services en tant que tueur à gage.
L’idée de base est déjà intéressante et peut être exploitée de différentes manières, remplacer un prêtre qui officie dans un quartier où les gangs produisent du crack et régissent la vie des habitants par la terreur, son combat peut l’amener à se retrouver la cible d’un contrat, un acteur d’Hollywood victime de chantage… Mais les auteurs n’en sont pas restés là, et au fur et à mesure des histoires c’est le changement répété et la profondeur d’immersion qui influent sur la personnalité de Christopher Chance au point de se perdre, ils ont même étés encore plus loin, mais pour le coup je suis obligé de me taire pour laisser la surprise au lecteur.
Cette série tient du polar, de la critique de la société, de la psychanalyse, de quoi en surprendre plus d’un par la richesse du fond comme de la forme. et étant donné l’épaisseur de chaque volume de quoi vous offrir de longs moments de lectures immersives.
Et pour finir, que dire d’autre que le tome 2 de Northlanders, le livre Islandais de Brian Wood, est sorti et que c’est l’un des titres que nous attendions le plus tous les trois à la librairie.
Bonjour,
J’ai écrit un livre sur Romero, aux éditions L’Harmattan, intitulé :Romero et les zombies, pourriez-vous en parler ? C’est un livre de cinéma et de philosophie.
Merci beaucoup…
Joachim Dupuis